Black Swan : Black Swan is beautiful

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Black Swan : Black Swan is beautiful
Darren Aronofsky, épaulé par une Natalie Portman qui semble miser sa vie sur l’autel du cinéma, a enfanté une œuvre inouïe et tétanisante. D’une beauté formelle et émotionnelle sidérante, "Black Swan" laisse K.O.

Natalie Portman, ex-enfant star, danse avec le Diable. Ses beaux yeux d’actrice bankable son exorbités, à la fois froids comme la mort et injectés d’un sang aux couleurs de l’enfer. Son corps si convoité couvert d’un tutu blanc comme un fantôme est traversé de gestes d’une grâce infinie, d’une précision au millimètre, intense, inhumaine. Ces quelques dizaines de secondes, irréelles, belles et cauchemardesques, constituent la première séquence de Black Swan. Et déjà on peut tout lire dans le regard de Portman, qui semble avoir définitivement oublié son métier d’actrice pour se fondre dangereusement dans l’âme torturée de Nina, danseuse de ballet à la rigidité glaciale, belle comme une poupée de porcelaine, socialement inexistante, sexuellement endormie.

Pour Nina, la vie se résume à ses ballerines, ses collants, son justaucorps. Obsédée par les auditions du rôle principal d’une énième version moderne du Lac des Cygnes, Nina déchante face au concept pervers de la mise en scène du ballet : le Cygne blanc, incarnation de la pureté et de la douceur, et le Cygne noir, qui est bien entendu son exact inverse, devront être interprétés par une seule et même danseuse.

Prête à relever tous les défis les plus extrêmes avec une rigueur malsaine, elle se heurte à la direction artistique vicieuse de Thomas, pour qui la discipline de fer de Nina ne vaut rien si elle est impuissante à laisser s’exprimer ses instincts les plus basiques. Nina, jeune fille sujette à des complexes inqualifiables, encore réfugiée au domicile d’une mère possessive qui immanquablement l’accable de ses propres frustrations, est sommée d’attiser sa propre soif de débauche, de chair et de luxure. Dans une douloureuse recherche de sa nature bestiale, qui lui permettrait d’atteindre une perfection inespérée, Nina tiraille sa santé physique et mentale dans des proportions alarmantes.

Descentes aux enfers



Darren Aronofsky a, dès le début de sa jeune carrière, montré un intérêt assez inquiétant pour les descentes aux enfers bien sordides, que ce soit dans Pi ou dans Requiem for a Dream. Dans le premier, que l’on qualifie trop souvent du terme barbare et soporifique de "thriller mathématique", le réalisateur réussissait à instaurer un climat d’angoisse insidieux autour d’un personnage surdoué que son exceptionnel QI condamnait à la solitude, à la paranoïa ou à la convoitise. C’est d’abord à ce long-métrage que l’on pense en sortant de la salle obscure. Tout comme le protagoniste de Pi, Nina est son propre dictateur, son adversaire principal, son pire ennemi.

Mais Aronofsky a eu une heureuse révélation depuis, avec The Fountain et The Wrestler : il a abandonné le montage épileptique qui piratait tant son odieusement surestimé Requiem for a Dream pour laisser à ses personnages le pouvoir d’exister et d’émouvoir.  Dans Black Swan, on économise les mots et on ne surligne rien, les tourments de la bouleversante Nina mordent les spectateurs aux tripes, et Natalie Portman atteint la perfection, comme si, pour appréhender son rôle, elle s’était identifiée au-delà du raisonnable aux motivations et aux blessures non-cicatrisées de Nina. Un tel dévouement pour un personnage fait froid dans le dos, et on le retrouve dans de rares occasions (De Niro pour Raging Bull, Dewaere pour 0[film%][/film%], Keitel pour Bad Lieutenant...). Pour autant, pas un acteur ne semble souffrir de la comparaison (et on préfère largement quand Cassel tourne dans un Aronofsky ou un Cronenberg plutôt que dans une pub pour parfum).

Une pression insoutenable



Comme Aronofsky a trouvé son actrice miraculeuse, comme il a adopté une sobriété bienvenue et comme il sait désormais tirer parti de ses excès stylistiques pour illustrer le malaise névrotique jusqu’à l’hystérie terrifiante, c’est sans hésitation qu’on désigne Black Swan comme un chef d’œuvre absolu. Un drame intimiste déchirant déguisé en thriller tétanisant, d’une homogénéité surprenante au vu des nombreux thèmes abordés. Avec la danse classique, discipline si stricte qu’on la considère souvent comme le plus difficile des arts, Aronofsky a trouvé le sujet en or pour pousser l’angoisse à son paroxysme. Est-ce un hasard si Darren Aronofsky partage ses initiales avec Dario Argento, le réalisateur de l’autre film de danseuses traumatisant (Suspiria) ?

On appréhende à tout moment qu’un tendon d’Achille craque sous la pression, qu’une faute de rythme gâche l’entière chorégraphie filmique, qu’un geste brusque provoque la fin du monde. Mais aucune faute de goût ne vient entacher l’immense film de Darren Aronofsky, et c’est le souffle coupé que l’on ressort de la salle de cinéma, le cœur battant, l’impression d’avoir été violemment molesté mais d’y avoir pris du plaisir.

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