Elisabeth Quin ("28 minutes") : "Ça me fait marrer d'arriver avec des écureuils brodés sur les épaules"

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Elisabeth Quin ("28 minutes") : "Ça me fait marrer d'arriver avec des écureuils brodés sur les épaules"
Par Florian Guadalupe Journaliste
Passionné de sport, de politique et des nouveaux médias, Florian Guadalupe est journaliste pour Puremédias depuis octobre 2015. Ses goûts pour le petit écran sont très divers, de "Quelle époque" à "L'heure des pros", en passant par "C ce soir", "Koh-Lanta", "L'équipe du soir" et "La France a un incroyable talent".
Elisabeth Quin.
Elisabeth Quin. © Paul Blind
puremedias.com a interviewé l'animatrice de l'access d'Arte, à l'occasion des 5 ans de l'émission.

"28 minutes" fête son cinquième anniversaire au sommet ! Lancée en janvier 2012, l'émission d'access d'Arte a réussi à plus que tripler son audience en quatre ans, signant notamment le 7 novembre 2016 son record historique avec 878.000 téléspectateurs, soit 3,9% du public. Le magazine a d'ailleurs enregistré l'un de ses plus beaux mois en décembre 2016, fédérant en moyenne 717.000 fidèles, soit 2,9% de parts d'audience. puremedias.com a rencontré celle qui incarne ce talk d'actualités, Elisabeth Quin.

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Propos recueillis par Florian Guadalupe.

"On bénéficie d'un effet de désaffection par rapport à d'autres programmes, notamment ceux de Canal+"

Comment expliquez-vous qu'en quelques années, la marque "28 minutes" soit devenue si puissante ?
Je pense qu'on a récolté le fruit d'un travail de toute une équipe, qui tente d'être le plus excellent et le plus pertinent possible, par rapport à l'actualité française, européenne et internationale. D'autre part, on avait fait le pari de la contre-programmation, qui était plus que risqué à l'heure des JT et de toutes les émissions en même temps que nous. Nous sommes contents, nous ne nous sommes pas trompés. Puis, peut-être qu'on bénéficie d'un petit effet de désaffection par rapport à d'autres programmes qui ne marchent plus ou qui marchent moins, notamment ceux de Canal+. C'étaient des émissions qui appartenaient à la petite mythologie de la télévision et qui se sont essoufflées. Vivant dans une période extrêmement anxiogène sur tous les plans, on apporte une réponse, qui est à la fois intéressante sur le fond et dans un registre chaleureux, spirituel et sympathique.

Arte enregistre une audience annuelle en hausse, peut-on dire que votre magazine est le moteur de la chaîne ?
Je pense qu'il y a quelque chose de très spécifique attaché à l'image d'Arte. C'est vraiment une proposition de télévision différente, à mon sens intéressante, euphorisante, libre et ouverte. Je crois que toute la tranche d'info, le JT avant nous et nous, dans un contexte super concurrentiel, draine et vertèbre la chaîne.

Comment arrive-t-on à maintenir une audience aussi honorable chaque jour, quasiment tout le temps au-dessus de 600.000 téléspectateurs ?
Nous sommes contents, car le public est de plus en plus volatil. Ce qui vaut pour la presse écrite vaut pour la télévision, sachant que maintenant la télévision se consomme de manière à la fois fragmentaire et mosaïque. Il y a une espèce d'explosion et de grande reconfiguration des modes de consommation. Alors réussir à capter tous les soirs devant le poste des gens, je ne sais pas à quoi ça tient, peut-être une sorte d'ensorcellement ou du miracle. Je suis incapable de l'analyser, je ne peux que m'en réjouir. Il y a forcément quelque chose que l'on apporte qui est de l'ordre d'un ton et d'un regard différents.

"On s'intéresse à des thèmes qui retiennent assez peu l'attention des panurgistes que sont les médias mainstream"

Après avoir plus que triplé l'audience en quatre ans, vous pensez un jour pouvoir atteindre la barre du million ?
Ce serait épatant. Je suis sûre que si l'on fait des projections mathématiques, ce n'est pas impossible, avec un invité encore plus exceptionnel que ceux qu'on a tous les soirs. Avec une espèce de hasard qui ferait que l'actualité, quelque chose de plus faible en face et un invité incroyable, ce n'est pas impossible.

Vous réalisez votre record historique le 7 novembre 2016, avec 878.000 téléspectateurs et 3,6% du public, en proposant une émission autour de la Cop22, c'est ça la force de "28 minutes", la contre-programmation ?
Oui, le débat n'était pas sur la Cop21 de Paris, mais la COP22 à Marrakech, dont tout le monde se foutait éperdument. On était en plein "trumpisme" aïgu. Notre force, c'est aussi ça, on prépare un débat sur le Yémen demain (entretien réalisé le mercredi 18/01/2017), un pays supplicié par la guerre civile. Personne ne parle du Yémen en ce moment. C'est quand même crucial, car tous les acteurs du Moyen-Orient sont en train de martyriser ce pays. Par moment, on a la force de ce pas de côté et on s'intéresse en profondeur et dans la durée à des thèmes qui retiennent assez peu l'attention des panurgistes que sont les médias mainstream.

L'autre atout de "28 minutes" n'est-il pas la diversité de ces chroniqueurs ?
C'est le pluralisme. Ils ont chacun un jour dans la semaine, ils sont cinq, en comptant Renaud Dély le vendredi. Il fait encore plus partie de la famille, car c'est lui qui incarne l'émission l'été, il est mon alter. On a choisi ces chroniqueurs parce qu'ils sont brillants, compétents et bons camarades. Pour créer une bande, c'est pas mal.

"Le revenu universel de Benoît Hamon, a priori, je ne comprenais rien"

Prépare-t-on votre journal comme un JT classique ?
Je n'en sais rien, je n'ai jamais travaillé à la télé. Je viens plutôt de la presse écrite et de la télévision culturelle. Tout ce que je sais, c'est que nous, on travaille tout le temps. On s'interroge tout le temps sur qui sera intéressant, passionnant, singulier et différent à interviewer en invités, ou qui sera bouleversant dans son témoignage. Ensuite, tous les jours, on se demande quel est le fait saillant de l'actualité, qui fait que l'on pourra apporter un regard différent. Là où il y a dans les médias et dans la vie politique extérieure aux médias, de plus en plus de rapports de force et d'imprécation - Trump cristallise ça de plus en plus -, on fait confiance dans la dialectique, le doute, le débat et le pluralisme. On se cramponne pour que tout ça persiste et demeure.

Avec cette contre-programmation, vous abordez des sujets très pointus, est-ce toujours accessible à tous les publics ?
L'enjeu est de les rendre accessibles, et je pense que ça marche, sinon on n'aurait pas autant de téléspectateurs. On veut rendre accessible un débat sur le Brexit ou sur le revenu universel, que porte Benoît Hamon - même s'il est revenu un petit peu en arrière -, mais auquel a priori, moi je ne comprenais rien. On avait envie d'avoir trois personnes avec des avis divergents, qui nous expliquent ce que c'est et si c'est faisable. On se demande toujours comment non pas vulgariser - même si dans la vulgarisation, il n'y a rien de vulgaire -, mais comment rendre accessible précisément des sujets qui pourraient sembler rebutants. Tout le monde est citoyen, tout le monde est concerné par l'économie ou par les guerres qui se passent à quatre heures d'ici.

Quelles sont vos exigences au quotidien ?
D'abord, l'excellence ! Ensuite, l'accessibilité à tous, sachant qu'on a même des gamins de 9, 10, 12 ans qui nous regardent, parce que leurs parents regardent, mais qui se sont piqués au truc. Il faut aussi qu'il se passe quelque chose sur le plateau de chaleureux et de bienveillant. En amont, on ne veut jamais se satisfaire de l'à peu près.

"La martingale 'plus vous êtes partout, plus le programme va marcher', c'est faux !"

Aujourd'hui, quand on commente les talk de l'access à la télévision, on parle beaucoup de Cyril Hanouna, de Yann Barthès ou de "C à vous", vous ne trouvez pas ça injuste ?
Je n'ai aucun égo. Très franchement, je m'en fous. Evidemment, j'ai envie qu'on en parle, mais je n'ai pas envie qu'on parle de moi, je préfère qu'on parle du programme ou de l'équipe qui le fabrique. Plus on en parle, mieux c'est. Il se trouve que l'on peut ne pas parler de vous autant qu'on parle des autres, ce qui n'empêche pas les gens de vous plébisciter. Ce côté, la martingale "plus vous êtes partout, à la Une de 'Télé 7 Jours' ou dans les journaux, plus le programme va marcher", c'est faux ! La preuve par tous les programmes dont on parle et qui ne marchent pas. Puis, il y a les programmes dont on parle qui marchent et il y a les programmes dont on parle moins, et qui marchent quand même. On appartient à cette très chanceuse troisième catégorie.

Dans votre "année médias" sur puremedias.com, vous aviez désigné pour la personnalité médiatique de l'année, le phénomène de "post-vérité" aux Etats-Unis. Selon vous, est-ce que ce concept de "post-vérité" est en train de se reproduire en France à l'aube de la présidentielle ?
Cela a été forgé en fait par des éditorialistes au Royaume-Uni, qui concernait ce qu'il se passait avec l'élection de Donald Trump. En France, on est déjà dedans et c'est la conséquence de la révolution numérique. Sans jugement moral ou de valeur sur cette révolution numérique qui a démarré depuis une quinzaine d'années, cette conséquence est précisément le fait que l'émotionnel, le pulsionnel et l'immédiat l'emportent sur tout ce qui est de l'ordre du rationnel et de la réflexion. La récupération de ce phénomène par des hommes politiques, qui vivent de ça, a pour conséquence le Brexit, Donald Trump et dans une moindre mesure, ce qui se passe en France et en Turquie.

En tant que journaliste, c'est votre rôle d'en parler ?
Oui, d'y réfléchir et d'essayer de déconstruire le phénomène, qui touche les médias, dont je fais partie, la politique et la vie de tout le monde. C'est le rôle des médias, y compris de faire leur auto-critique. Il y a des médias qui sont toujours en surplomb par rapport au bon peuple, qui font la leçon et prétendent avoir la vérité ultime.

"Une émission politique peut être faite autrement qu'avec juste trois connards derrière une table interviewés par trois personnes qui sont toujours les mêmes"

Toujours dans votre "année médias", vous avez été assez critique à l'égard du programme "Une ambition intime" sur M6. Vous pensez que le programme désacralise les émissions politiques ?
Ce n'est pas les émissions que ça désacralise, ce sont les politiques tout court. C'est le rôle de l'homme politique qui se désacralise lui-même, en acceptant d'y aller, il suffirait de dire non. Je pense que tout ne se vaut pas. Un mec, les jambes repliées sur un canapé, qui fait semblant de pleurer, face à une animatrice qui lui fait des chatteries et des oeillades, attente d'une certaine manière à la fonction de l'homme politique qu'il est. Je ne suis pas en train de juger les responsabilités du diffuseur, de l'animatrice ou de l'homme politique. Je pense juste que ce genre de programme accélère la confusion et la déhiérarchisation. C'est pas mal que l'on ne soit pas dans le grand mélange de tout. Une émission politique, ça peut aussi être fait autrement qu'avec juste trois connards derrière une table interviewés par trois personnes, qui sont toujours les mêmes. On peut réinventer le truc, avec des intellectuels, des sociologues, des ouvriers ou des agriculteurs qui interviewent un homme politique, mais pas nécessairement un programme aussi putassier dans la forme et dans la communication qui l'accompagnait.

Est-ce que vous comptez recevoir les candidats à la présidentielle dans "28 minutes" ?
Non, parce que c'est la politique d'Arte ! La politique de ne pas avoir de politiques à l'antenne. Cela nous force à être inventif, c'est-à-dire qu'au lieu de les recevoir et de les entendre réciter des discours qui sont rodés et calibrés pour les médias, c'est de parler avec des experts de ce qu'ils évoquent, eux, dans la campagne, mais de faire décrypter par des experts les problématiques qu'ils évoquent. En fait, on parle de ce dont parlent les politiques sans les politiques. On ne se contente pas d'être comme des oies, qui ouvrent la bouche et à qui on apporte une parole toute faite.

"Je ne suis plus un poulet de printemps"

Après un bon bilan d'audience à la tête de votre magazine, Arte vous a-t-elle proposé d'autres projets ?
Je n'ai pas le temps ! Ils sont extrêmement prudents, ils se sont bien rendu compte que l'on travaille comme des bourriques et que l'on est ravi et euphorique de travailler autant, mais que pour le moment, d'autres projets seraient prématurés. Personnellement, je n'aurais pas le temps de faire autre chose. Peut-être à terme, un documentaire.

Vous n'avez pas été contactée par d'autres chaînes ?
J'ai les cheveux gris, je n'ai pas 35 ans, je ne suis plus un poulet de printemps... Non, je plaisante (rires) Pourquoi essayer d'aller faire moins bien ailleurs sur une chaîne qui ne serait pas Arte, qui aurait donc une manière d'envisager l'audience... Quand je vois ce qu'il s'est passé sur France 2, avec des programmes qu'ils zappent, quels qu'ils soient, au bout de deux mois, parce qu'aujourd'hui, si tout n'est pas formidable en deux mois, on vous jette. On n'aurait pas pu ! Nous, on a mis six mois à exister et à s'installer pour trouver notre formule. Nous sommes sur une chaîne exceptionnelle, en termes de latitude laissée aux gens qui font les programmes, de liberté, de respect, de bienveillance, d'intelligence et de complicité. Qu'est-ce que j'irais foutre ailleurs ?

En entrant dans votre loge, j'aperçois toutes vos vestes très colorées. C'est votre marque de fabrique, comment les choisissez-vous chaque soir ?
(Rires) Moi, ça me fait marrer. Arte est considérée comme une chaîne archi intello et archi haut de gamme, donc ça me fait marrer d'arriver tous les soirs à 20h05 à l'antenne avec des pulls invraisemblables, extravagants, avec des homards, des écureuils brodés sur les épaules, des machins à paillettes. Je trouve que c'est une manière de dire que l'on peut parler de choses extrêmement sérieuses, tout en étant vêtue au mieux comme une boule de Noël, au pire comme une boule de Noël (rires). Cela n'enlève rien à l'exigence. Je suis une fille, j'ai envie de m'amuser avec les vêtements. Soit je suis en noir tout le temps comme Ardisson, c'est une possibilité, soit c'est le grand no limit, j'ai choisi le grand no limit.

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