Thomas Legrand (France Inter) : François Hollande "a pris tous les risques"

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Thomas Legrand (France Inter) : François Hollande "a pris tous les risques"
Par Benjamin Meffre Journaliste
Passionné par les médias, l’économie et la politique, Benjamin est rédacteur en chef de puremedias.com dont il a intégré la rédaction en 2013.
Thomas Legrand
Thomas Legrand © Radio France/Christophe Abramowitz
L'éditorialiste politique de France Inter débriefe à chaud l'entretien accordé par François Hollande à la matinale de sa station.

Moins de deux heures après le départ de François Hollande de France Inter, Thomas Legrand, l'éditorialiste politique de la station, a accepté de débriefer à chaud avec puremedias.com le passage du chef de l'Etat sur sa station. Questionné par toute l'équipe de la matinale de Patrick Cohen, le chef de l'Etat s'est notamment agacé d'une question de Thomas Legrand sur le décalage entre sa parole durant la campagne et son action politique en tant que président.

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Propos recueillis par Benjamin Meffre

"On n'a rien négocié avec l'Elysée"

Comment la matinale de France Inter a obtenu la venue de François Hollande dans ses studios ?
Comme toute station de radio, on a une invitation qui court depuis très longtemps à la matinale de France Inter. En fait, c'est assez exceptionnel qu'un président vienne dans une matinale. Nicolas Sarkozy n'était allé dans aucune matinale (hormis en tant que candidat durant la campagne de 2012, ndlr) et François Hollande était allé une fois à RMC. C'est donc très rare parce que c'est quand même un exercice à haut risque pour eux. C'est du direct, il y a beaucoup d'intervenants. C'est moins maîtrisé pour lui qu'à la télévision. Et puis, il s'est prêté au jeu des questions des auditeurs de France Inter.

C'est donc l'Elysée qui a finalement contacté France Inter pour donner son feu vert ?
Non, cela ne se passe pas comme ça. Nous, nous étions en permanence en train de demander à l'Elysée quand cela pourrait se faire. Quand on a finalement proposé une invitation en début d'année, ils ont accepté et voilà.

L'interview a été annoncée le 2 janvier. Cela s'est-il vraiment décidé trois jours avant ?
Non. Ça s'était décidé avant et on avait décidé de garder cela un peu secret. Ni nous ni l'Elysée ne voulions que cela s'ébruite.

L'Elysée n'est pas intervenue en amont sur le contenu de cet entretien ?
Non, non. C'est nous qui avions proposé le format depuis longtemps et il a été accepté tel quel par l'Elysée. On n'a rien négocié.

Aviez-vous demandé un entretien similaire sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy ?
Oui et on ne l'a pas eu. Et on ne l'a d'ailleurs toujours pas eu depuis qu'il n'est plus président.

"France Inter n'est pas une radio de gauche ou de droite"

Vous pensez qu'il y a beaucoup plus de risques à faire un grand entretien à la radio plutôt qu'à la télévision ?
Je ne pense pas qu'il y ait plus de risques. Mais c'est forcément beaucoup moins maîtrisé par le président. Quand le président fait un entretien à la télévision à l'Elysée ou sur un plateau, c'est toujours un peu cérémonieux. C'est plus du monologue sécurisé avec des relances de la part des journalistes alors que là, il y a ces moments de ping pong plus spontanés qui sont inhérents à la radio. La radio, c'est plus intime, c'est plus vif. L'irrévérence est davantage de mise. Pour un président de la République, c'est aussi se départir un peu d'une certaine solennité. Donc c'est courageux. En même temps, quand on est à moins de 20% de popularité dans les sondages, il faut prendre tous les risques. Il les a pris. Je ne pense pas qu'il s'en soit mal tiré d'ailleurs.

Pourquoi selon vous a-t-il choisi la matinale de France Inter ? Pourquoi maintenant, cinq jours seulement après ses voeux du 31 décembre ?
Parce quand le président veut s'adresser au plus grand nombre, il prend la radio la plus écoutée à cette heure-là. J'ai entendu dire qu'il voulait s'adresser à la gauche en allant sur France Inter. Les auditeurs de France Inter sont beaucoup plus variés qu'on ne le croit. Ceux qui ont pu entendre la matinale d'aujourd'hui s'aperçoivent que ce n'est pas une radio de gauche ou de droite, proche ou éloignée du pouvoir. C'est une radio qui fait son boulot tout simplement. Je pense qu'on a pu l'entendre ce matin.

"On n'a pas à se caler sur sa volonté d'annonces"

Pourquoi maintenant alors ? L'Elysée avait précisé qu'il n'y aurait pas d'annonces particulières. Ne preniez-vous pas le risque de participer à une vaste opération de communication ?
Il y a toujours ce risque-là. Mais je pense qu'on l'a plutôt évité ce matin. Et puis même s'il n'y a pas d'annonces, on a quand même des choses à lui demander. Si on n'invitait les présidents que lorsqu'ils décident de faire des annonces, là on serait simplement un tuyau de communication. Là on l'invite parce qu'on a des choses à lui demander en dehors de tout son agenda. On n'a pas à se caler sur sa volonté d'annonces.

Une interview présidentielle, ça ne se refuse pas pour un médias de toutes façons ?
Non, non. Il ne faudrait pas qu'il vienne tous les matins non plus. On finirait par refuser (rires). Mais c'est tellement rare ! Surtout, dans mes éditos, j'analyse souvent la communication des politiques. J'ai toujours été très agacé par la communication présidentielle sous Chirac, Sarkozy et parfois Hollande. Comme s'il y avait des endroits où les présidents ne pouvaient pas s'abaisser à aller comme la radio par exemple. Or, la radio, c'est vraiment le média populaire par excellence. On est chez les gens, on est dans leur intimité, leur vie quotidienne. Je n'ai jamais compris pourquoi les présidents rechignaient à venir. François Hollande vient, tant mieux.

"Il y a un décalage trop grand entre la parole et l'action politique"

A chaud, êtes-vous satisfait globalement de cet entretien ?
Quand on sort d'un entretien comme ça, même si on a eu beaucoup de temps, on a toujours des frustations parce qu'on aurait voulu aller plus loin sur tel et tel sujet. C'est toujours compliqué d'avoir un échange avec le président et de lutter contre la communication pour avoir de l'information. On ne peut pas trop le laisser développer quand on sent que c'est de la communication. Et du coup, ça prend un peu de temps et on ne peut pas tout faire.

Si vous deviez retenir une chose de ces deux heures ?
Personnellement, c'est le moment que j'ai eu en face de lui. Tous les matins, j'analyse le discours politique et mon truc c'est de comparer ce qui est dit et ce qui est fait. C'est assez basique. Je trouve qu'il y a un décalage trop grand entre la parole et l'action politique. Je voulais revenir là-dessus.

Oui, vous l'avez d'ailleurs agacé en l'interrogeant sur le décalage existant entre ce qu'il avait dit durant la campagne et son action d'aujourd'hui notamment avec la loi Macron. Aviez-vous prévu d'insister sur cette question ?
Oui, je l'avais prévu. Je ne comprends pas en fait. Je pense que s'il avait eu le discours qu'il tient maintenant pendant la campagne, il aurait quand même gagné. Et ce qu'il fait maintenant serait beaucoup mieux accepté et lui-même serait aussi mieux accepté des Français. Ce petit moment-là me reste en tête.

"Il n'y a pas de rancoeur du tout"

Il ne vous a pas fait une remarque là-dessus après coup ?
Non, non. Il a rigolé et il a dit : "Je vous reconnais bien-là". Il ne m'en a pas du tout voulu. Il est très ouvert à la contestation. Ca peut être un peu dur à l'antenne mais à la fin, il n'y a pas de rancoeur du tout.

On attend toujours de ce genre d'entretiens un moment particulièrement fort qui fera date ? Pensez-vous qu'il y en ait eu un ce matin ?
Je ne sais pas. Je n'ai pas assez de recul.

Concernant les questions des auditeurs, prenez-vous des précautions supplémentaires lorsqu'il s'agit du président de la République ?
Pas vraiment. On essaye de faire en sorte que les thèmes des questions soit des thèmes pas trop politiciens et "concernants" si je peux utiliser ce terme très laid. Mais on s'est fait avoir sur une question ce matin qui n'était pas celle qui était annoncée mais qui était intéressante quand même. Ce n'est jamais totalement maîtrisé. C'est ça qui est bien. Ni pour l'invité, ni pour nous.

François Hollande a rendu hommage à la fin à France Inter et au média radio en général ? Cela vous a touché ?
Oui, ça nous a touché. Parce que la radio malgré tous les réseaux sociaux et les multiples écrans, ça reste un média extrêmement particulier qui réunit tout le monde. C'est le média populaire par excellence. Je pense que France Inter incarne cela avec ce slogan : "Populaire et de qualité". J'étais content de ma radio ce matin (rires). Il y a souvent cette idée que France Inter serait "la radio de gauche". Ça, ça m'exaspère. On est la radio de tout le monde. Et je trouve que ça s'est entendu ce matin.

"Le travail des communicants a moins de prise à la radio"

Pensez-vous que la radio soit un média plus favorable à François Hollande que la télévision ?
Je ne sais pas. Quand on écoute à la radio, il n'y a pas l'apparence, le body language. Je pense en fait que le travail des communicants a moins de prise à la radio qu'à la télévision. Moi, mon boulot de journaliste, c'est de faire de l'anti-communication, c'est de lutter contre les communicants.

Vous pensez y être parvenu ce matin ?
Non, pas totalement (rires). Mais un peu quand même.

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