Nos séances de farniente étaient rythmées l'été dernier par l'affaire Woerth/Bettencourt. Ses histoires de fric, de politique, de manips et d'affaires de familles. Elles alimentaient la chronique de nos hebdos mais aussi nos blablas entre deux baignades. Cet été, la presse "sérieuse" a trouvé sa nouvelle saga : l'affaire DSK. Partie bien trop tôt (le 15 mai), elle a été relancée (ouf !) par la plainte de Tristane Banon contre l'ex-patron du FMI pour tentative de viol. Et elle n'en finit pas d'alimenter la chronique politico-judiciaire depuis. L'une attaque, l'autre confirme, DSK riposte, l'ex-femme de l'un et marraine de l'autre réplique. Vous partez une semaine et vous êtes complètement largué. Dernier événement en date, l'avocat de Banon, David Koubbi, arrivé discrètement aux Etats-Unis pour rencontrer l'avocat d'une autre présumée victime, Nafissatou Dialo. Cet avocat qui avait, souvenez-vous, juré ne pas vouloir mélanger l'affaire américaine avec le dossier français a rencontré le procureur de New-York, hier. La lumière de la ville était sans doute trop forte pour y résister.
Aux premières loges de ce feuilleton estival, un journal, Le Figaro. Le quotidien dirigé par Etienne Mougeotte se passionne pour l'affaire et ses soubresauts depuis le premier jour. "La honte" titrait il y a quelques semaines son magazine du week-end. La nouvelle veste d'Anne Sinclair, Anne Sinclair forte dans l'épreuve, DSK qui sourit, DSK qui sort de chez lui : chaque micro événement a fait la Une du quotidien. Sa dernière révélation concerne François Hollande. Hier, le titre de sa manchette (rien que ça) : "Affaire DSK/Banon, François Hollande va être entendu". Montage à l'appui, on croirait Banon et Hollande pris en photo tous les deux, dans la rue, au même moment. Hollande entendu pourquoi, au fait ? Banon l'affirme, il a été dans la confidence de son agression présumée. Lui jure ne pas s'en souvenir. Seul hic, cette audition d'Hollande en septembre, personne n'en a entendu parler à part Le Figaro. Pas même les enquêteurs, censés la déclencher. "Nous n'avons encore rien prévu du tout là-dessus concernant une audition de François Hollande, certains ont des intérêts qui nous échappent" confie l'un d'eux à Libération ce matin. Cette information valait-elle les honneurs de la Une ? "Le poison DSK se distille lentement au sein du PS, polluant aujourd'hui la candidature de François Hollande" écrivait hier la journaliste du Figaro auteure du scoop. Mais qui pollue qui, au juste ?
Ces "intérêts" dont parlent les enquêteurs n'échappent pas à François Hollande, justement. Qui crie à la manip : "Ca suffit ! Ce que je n'accepte pas, c'est la manipulation d'une affaire qui n'est pas la mienne, qui n'est pas celle du PS, à des fins politiques !". Ses lieutenants s'insurgent, aussi. "S'ils veulent le convoquer, c'est demain ou après-demain (...) tout ça part d'un journal qui était de droite, mais plutôt de référence. Là on entre dans des modes de fonctionnement dignes du caniveau" lâche à Libé François Rebsamen. Pendant ce temps, maman Banon, Anne Mansouret, parle, elle aussi. Dans Le Parisien et Libération ce matin. Le récit de son audition où elle confie avoir couché avec DSK (et un rebondissement, un !) hier dans Le Monde, aujourd'hui dans L'Express. Même si elle continue d'affirmer qu'Hollande était au courant de l'agression, elle nuance dans Libé : "François Hollande est le seul être humain que j'ai rencontré en politique". Une manière de rappeler au Figaro que la place du "témoin" Hollande dans ses colonnes est disproportionnée ? Qu'importe, Le Fig la tient, la casserole qu'il cherche à Hollande depuis des mois, depuis les frémissements de sa lente mais solide ascension dans les sondages pour la présidentielle. Elle ne fait pas encore suffisament de bruit mais en insistant bien, ils y arriveront, à instaurer le doute. Savait-il, à l'époque ? Pourquoi n'a-t-il rien dit ? Est-il coupable de non-dénonciation de crime ?
Passion, manipulations, sexe, amitiés, politiques, boules puantes : ouvrez vos journaux, régalez-vous. Vous n'êtes pas tombé sur l'un des insipides cahiers d'été de votre journal. Mais sur une histoire vraie disent-ils, une histoire que vous allez tous vivre en temps réel. Un Secret Story dans les couloirs du pouvoir politique. On la tient, notre saga estivale.
