

Même en ayant rendu les armes, C8 continue de se faire taper sur les doigts par les gendarmes de l'audiovisuel. Ce jeudi 17 avril, près d'un mois et demi après l'extinction du signal, le Conseil d'Etat a confirmé la mise en demeure par l'Arcom de l'ancienne chaîne de la TNT pour manquement à son obligation de respect de la dignité de la personne, selon la décision consultée par le site "Satellifacts". Cette sanction fait suite à une séquence polémique diffusée dans le numéro de "Touche pas à mon poste" du 5 février 2024, au cours de laquelle Loana avait été interrogée par Cyril Hanouna et sa bande sur le viol dont elle aurait été victime en septembre 2023. Le régulateur avait alors noté des manquements sur "le respect de la dignité de la personne humaine", "la retenue dans la diffusion d'images ou de témoignages susceptibles d'humilier les personnes" et "l'absence de complaisance dans l'évocation de la souffrance humaine". L'ancienne candidate de télé-réalité avait en effet éprouvé de grosses difficultés d’élocution qu’elle attribuait à son traumatisme.
L'ex-canal appartenant à Vincent Bolloré avait formé un recours en annulation contre cette mise en demeure en mars 2024. Mais le Conseil d'Etat l'a débouté, écartant notamment l’argument tiré du fait que Loana aurait consenti à la diffusion des photographies, qu’elle a elle-même fournies, et à la révélation de l'agression dont elle a été victime. La juridiction administrative considère que ces éléments sont "sans incidence" sur l’appréciation des différents manquements de la chaîne. Outre ce fait, les juges administratifs estiment que "la séquence se caractérise dans son ensemble, outre la diffusion des photographies du corps dénudé de la victime du viol, par un enchaînement pressant de questions insistantes et extrêmement intimes posées à l’invitée sur les circonstances particulièrement traumatiques de son agression, alors même qu’elle présentait des difficultés d'élocution marquées traduisant sa vulnérabilité".
L’ensemble de ces circonstances caractérise, "tant par le traitement complaisant et voyeuriste de l'événement abordé que par l’attitude des intervenants envers l’invitée qui en a été la victime", une atteinte au respect de la dignité humaine, estiment la section du contentieux. Elle constate également un manquement de l’obligation de l'éditeur à ses obligations en termes de retenue dans la diffusion d’images ou témoignages susceptibles d'être humiliants ainsi que "l’absence de complaisance à l'égard de la souffrance humaine".
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Dans son premier rapport, l'Arcom avait également relevé des propos tenus par les chroniqueurs autour de la table. "Vous le faites exprès de parler comme ça ?", avait demandé Jacques Cardoze, choquant les autres personnes autour de la table. "Est-ce qu'il y a une divergence entre ce que toi, tu as vécu et ce que la personne (...) t'aurais pu entendre dire, de ce qu'elle a dit ?", avait poursuivi Kelly Vedovelli. Plus tard, durant l'émission, la chroniqueuse et des personnes présentes derrière elle dans le public ont été vues amusées par la situation. Ces composantes ont été retenues par les juges, qui confirment le manquement au principe de maîtrise de l’antenne par l'éditeur. Et ce du fait que "l’amusement et le scepticisme suscités parmi les chroniqueurs de l'émission par les troubles d'élocution de l’invitée n’ont fait l’objet d'aucun recadrage ferme et aucune mesure n’a été prise par l’animateur pour permettre à l’invitée de se ressaisir alors même que ces difficultés se sont matérialisées pendant plusieurs minutes". Enfin, le choix de C8 de ne pas avoir rediffusé la séquence en replay et sur ses réseaux sociaux n'a pas obtenu la mansuétude de l'institution publique.