Porté par un duo Sagnier/Scott Thomas convaincant, "Crime d'amour" ne revisite ni ne révolutionne le polar français loin s'en faut, mais reste efficace.
On pensait avoir fait le tour des films français sur la manipulation en entreprise et la passion meurtrière. Pourtant, Alain Corneau nous propose en cette fin d'été un polar froid et captivant qui ravira les fans du genre mais laissera sans doute les autres dans le désarroi.
Un "crime d'amour" sado-masochiste et inégal
Crime d'amour revient sur les relations entre Christine, dirigeante aussi glaciale que sympathique de la filiale française d'une multinationale ultracodifiée, et Isabelle, jeune cadre supérieure à succès qui travaille sous ses ordres directs. La jeune femme, jouée par la toujours aussi éblouissante Ludivine Sagnier, voue un culte et une admiration totale à son mentor, jouée par l'inusable Kristin Scott Thomas. La relation dominante/dominée, ajoutée à une tension sexuelle immédiatement signifiée dès la première scène du film, crée une atmosphère sadomasochiste brillamment traduite à l'écran.
Si la première partie du film s'avère particulièrement jouissive dans le portrait des relations entre les deux jeunes femmes, multipliant les séquences d'humiliation, de rivalités, de mensonges et d'ambiguïté sexuelle, aidé par un très bon Patrick Mille en comptable corrompu, la seconde partie, plus "technique" est certes intéressante dans la démonstration du crime parfait, mais demeure trop longue dans un dénouement au final trop convenu et prévisible.
Esthétisme léché
Entre thriller, drame psychologique et polar, Alain Corneau revient donc pour nous proposer un film dont il a tenu à travailler l'esthétisme. Dans une multinationale froide et aseptisée, Corneau crée un environnement visuel intelligent, qui n'est pas sans rappeler celui qu'il avait imaginé dans l'adaptation du roman d'Amélie Nothomb, Stupeur et tremblements, et qui lui permet de donner un cadre crédible à son scénario.
On est au final un peu déçu par un film qui, plein de promesses, démarrait brillamment mais s'essouffle une fois le "Crime d'amour" accompli. On aurait espéré que ce point d'orgue évident soit la conclusion d'un film sur les relations machiavéliques entre les deux femmes, et non un prétexte à un polar ultra convenu. Heureusement, le trio d'acteurs est largement à la hauteur de nos attentes dans une réalisation esthétique et minimaliste qui demeure, en définitive, plus un plaisir qu'un supplice... A voir.