Dans la plupart des péplums, l'histoire humaine sert généralement de prétexte à traiter l'autre, la grande, celle qui permettra de montrer de belles batailles et de grandioses monuments. Alejandro Amenabar a choisi de faire autrement en s'intéressant à Hypathie, astronome érudite tentant de sauver le savoir de la bibliothèque d'Alexandrie en proie aux affres des religions : juifs, païens et chrétiens mènent une lutte sans merci, s'exterminant les uns après les autres. La science contre la religion, la raison contre la morale, l'homme contre Dieu.
Deux hommes se disputent l'amour de la belle, un riche noble et un jeune esclave. Tous doivent choisir leur camp, leur religion, pour ne pas subir la colère du peuple. Un thème et un traitement (jusque dans les costumes) qui rappelle les guerres de religion, y compris les plus récentes, avec des chrétiens fondamentalistes qui nous prouvent que les talibans n'ont rien inventé. Chacun y va de sa morale, de son appel à la tolérance, avant de prendre le pouvoir et de régler ses comptes à grands coups de pierres (on aime en effet particulièrement la lapidation, dans ce film).
Amenabar dans la cour des grands
Pour un réalisateur comme Amenabar, qui s'est essayé à autant de styles qu'il a de talent (c'est à dire beaucoup), on attendait donc une vision nouvelle du péplum. La mise en scène ne s'éloigne pourtant pas des classiques du genre, avec ses vols planés au-dessus de la ville et son orchestre symphonique en arrière-plan.
Mais à trop vouloir raisonner plutôt que de montrer, notre héroïne s'égare en considérations diverses pendant qu'Amenabar se complaît à filmer les hommes comme des fourmis, censé montrer la réalité de notre monde. On apprécie toutefois la volonté d'éviter au maximum l'image numérique et de travailler en images réelles. Un film qui prouve qu'Amenabar est prêt à s'imposer dans la cour des grands d'Hollywood, même si son talent était jusqu'à aujourd'hui mieux servi dans celle des petits d'Europe.