Daphné Roulier, journaliste sur LCP : "Pour une femme de 55 ans, les places sont encore plus chères à la télévision"

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Daphné Roulier, journaliste sur LCP : "Pour une femme de 55 ans, les places sont encore plus chères à la télévision"
Par Ludovic Galtier Lloret Journaliste
Né en Isère entre le tirage de la première boule noire de l'histoire de "Motus" - "Oh-ohohohoh" - et la première visite de candidats à "Fort Boyard", Ludovic Galtier est journaliste à Puremédias depuis octobre 2021. Il est passionné par la politique, l'économie des médias et leur stratégie de programmation.
Le générique de "Maman, j'ai arrêté l'avion", mensuelle sur l'environnement présentée par Daphné Roulier sur LCP. © Nicolas Kovarik - Agence 1827 pour LCP
L'ancien visage de Canal+ présente ce vendredi 12 mai à 21h le troisième numéro de "Maman, j'ai arrêté l'avion", son magazine dédié à l'environnement, sur LCP. Entretien.

Du reportage, de l'expertise, du débat. Après la "Fast Fashion" en mars et la consommation de viande en avril, "Maman, j'ai arrêté l'avion", l'émission mensuelle de LCP dédiée à l'environnement, s'intéresse à la thématique de l'eau, un sujet on ne peut plus d'actualité avec les effets déjà visibles de la sécheresse. Daphné Roulier, sa présentatrice confronte les modèles et interroge sans concession les politiques. Entretien avec l'ancien visage de Canal+.

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Propos recueillis par Ludovic Galtier

puremedias.com : Daphné Roulier, c'est un phrasé et une passion dévorante pour les jeux de mots. "Maman, j'ai arrêté l'avion", c'est votre idée ?
Daphné Roulier :
Absolument ! Forte de mes années à "L'effet papillon", de ma pratique des jeux de mots et des calembours, il me semble qu'il vaut toujours mieux traiter des sujets sérieusement sans pour autant se prendre au sérieux. Ce titre résume cette ambition. Le sujet est en soi suffisamment tragique et anxiogène pour que l'on affiche un pas de côté. Il m'est venu naturellement. Je suis heureuse que LCP l'ait validé.

Ils ont dit
"J'ai proposé 'Maman, j'ai arrêté l'avion' un peu partout, j'ai obtenu des fins de non-recevoir un peu partout"
Daphné Roulier

Avez-vous frappé à d'autres portes par le passé ?
En réalité, cela fait des années que je m'intéresse à ces sujets-là et dix ans au moins que je porte une émission sur l'environnement. J'avais sollicité France 5 à ma sortie de Canal+ mais Hugo Clément venait de signer "Sur le front", ce que j'ignorais. Je l'ai proposée à peu près partout, j'ai obtenu des fins de non recevoir à peu près partout au prétexte que l'environnement plomberait l'audience. Or, c'est le défi majeur du XXIe siècle. Ne pas le traiter ou le traiter en transverse dans les JT ou à travers des documentaires me semble nettement insuffisant. C'est une hérésie, voire même un défaut d'information. Je suis heureuse que cette émission ait finalement trouvé asile sur LCP, la chaîne des députés. Il y a un gros travail d'information à faire, et un déficit à combler. Particulièrement auprès des élus. La scientifique du Giec Valérie Masson-Delmotte préconisait que nos députés suivent des formations sur les enjeux climatiques. En attendant, ils peuvent regarder LCP (sourire).

Comment s'organise l'émission ?
L'émission s'articule entre des invités en plateau, des reportages et un éclairage scientifique via "Le climatoscope" de Raphaël Hitier. Il me semblait important que cela ne soit pas juste une émission de débats. L'idée était de l'incarner en donnant la parole à des protagonistes, qui portent sur le terrain à la fois deux visions contradictoires du monde, deux modèles de production et de société. C'est notamment l'objet du reportage d'ouverture, le "Tout oppose", qui pose les enjeux.

Il n'y a pas de parti pris ?
Par la force des choses, je pense qu'il vaut mieux donner des clefs aux téléspectateurs que de vouloir les orienter ou leur dire quoi penser. C'est à eux de se forger leur opinion. En même temps, il est assez clair que la "Fast Fashion" (sujet de la première émission en mars, ndlr) n'est pas franchement un modèle vertueux alors que la planète est en surchauffe. C'est même un modèle écocidaire. Le dénoncer, c'est enfoncer des portes ouvertes. Mieux vaut montrer ce qui se cache derrière ce modèle et ce qui en découle concrètement, autrement dit son coût social et environnemental.

Sécheresse en Espagne, conflit autour de la mégabassine de Sainte-Soline (Deux-Sèvres)... L'eau est le thème de l'émission de ce soir. Pourquoi ce sujet nous concerne-t-il tous ?
De fait, l'été dernier, 2.000 communes n'avaient plus l'eau courante, donc plus d'eau potable. La question que l'on pose, c'est tout simplement comment amortir les chocs dans un contexte de stress hydrique ? Pourquoi continuer à soutenir des filières si gourmandes en eau ? L'agriculture irriguée représente 7,3% de la surface agricole mais siphonne énormément d'eau. Or, cette agriculture irriguée sert à produire majoritairement de l'alimentation pour les bêtes ou part à l'importation ! Autant dire que ceux qui prétendent que notre souveraineté alimentaire dépend de ces mégabassines se moquent de nous. On va droit dans le mur, en klaxonnant, mais on y va pied au plancher !

Ils ont dit
"L'interview politique ne me transcende pas du tout"
Daphné Roulier

Dans l'émission, vous interrogez avec pugnacité le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, qui - il le reconnaît lui-même - est acculé, notamment lorsque vous opposez son discours à celui de Marc Fesneau, son collègue du gouvernement à l'Agriculture. Vous le mettez face à son impuissance ?
Ce n'est pas pour rien que le ministère de la Transition écologique est aussi appelé le ministère de l'impossible. Aujourd'hui, les enjeux et les intérêts privés de l'agroalimentaire, de l'agriculture et de l'élevage intensif sont tels, les lobbys sont tellement forts... Que voulez-vous que Christophe Béchu fasse quand Marc Fesneau assure à la FNSEA (principal syndicat agricole, ndlr) que le secteur agricole n'est pas concerné par les efforts et qu'il pourra continuer à utiliser autant d'eau que par le passé ? Il y a une contradiction à vouloir s'adapter à la sécheresse en dispensant de tout effort le plus gros consommateur d'eau. C'est fou !

L'interview politique est un exercice qui vous enthousiasme particulièrement ?
Je vais être très honnête, pas du tout ! Les politiques sont très rodés à l'exercice de la rhétorique et aux éléments de langage. Déconstruire leur langue de bois n'a rien de franchement excitant. On aurait plutôt envie de les aider à se retrousser les manches. Il y a urgence.

Avez-vous une référence dans ce domaine ?
Anne-Sophie Lapix fait cela très bien. C'est une journaliste très rigoureuse et jamais dans la connivence. Son interview politique dans "Dimanche+" sur Canal+ était un modèle du genre. Léa Salamé maîtrise aussi très bien ses dossiers. Elle est très pugnace et n'a pas froid aux yeux. C'est essentiel de n'être n'y impressionnable ni dans la connivence. Plus jeune, j'adorais Michel Polac et sa façon de rentrer dans le lard des politiques.

Ils ont dit
"Je suis admirative de toutes les Greta Thunberg en puissance"
Daphné Roulier

Votre émission me permet d'évoquer le traitement de l'écologie dans les médias. Où vous situez-vous entre Hugo Clément (France 5 et France Inter), militant revendiqué, et Yves Calvi (RTL, BFMTV), inquiet pour "ces Français qui ont économisé toute leur vie pour avoir une piscine" lorsqu'il apprend que la vente des piscines hors-sol va être interdite cet été dans les Pyrénées-Orientales ?
Churchill avait coutume de dire : "Il vaut mieux prendre le changement par la main avant qu'il ne nous prenne à la gorge". Je ne peux qu'être d'accord avec lui. Comment je me situe ? Je dirai que je suis "consomm'actrice". Aujourd'hui, l'époque est à "J'achète donc je suis". Il y a urgence à déconstruire ce stéréotype auprès des jeunes, par exemple, qui font la queue devant la boutique éphémère de Shein (magasins de vêtements à très petits prix, ndlr) et leur dessiner de nouveaux horizons. Je suis admirative de toutes les Greta Thunberg en puissance qui disent : "Je n'achète pas donc je suis".

Il y a du boulot, non ?
Récemment, j'ai été invitée dans "C à vous" pour parler de l''Ultra Fast Fashion" et j'ai été attaquée sur les réseaux sociaux après avoir tenu à peu près ce discours. "Regardez qui parle, cette bourgeoise du VIIe qui s'habille chez les grands couturiers et donne des leçons aux pauvres", pouvait-on lire. Loin de moi l'idée de donner des leçons à qui que ce soit, encore moins aux ménages les plus modestes. Je tenais juste à rappeler que consommer est devenu un loisir à part entière et qu'il y a mille et une façons de s'habiller sans se ruiner ni ruiner la planète. Mais ce discours passe encore mal dans nos sociétés où consommer est devenu une raison d'être.

Ils ont dit
"Je n'ai pas arrêté l'avion"
Daphné Roulier

Pour reprendre le titre de votre émission, avez-vous arrêté l'avion ?
Je n'ai pas arrêté l'avion, je suis à moitié Grecque et je n'ai pas mon permis voiture. Rejoindre la Grèce par le train puis le bateau serait long et fastidieux eu égard au peu de temps que j'y passe une fois par an pour voir les miens. Jusqu'à la retraite, faute de temps, je n'ai pas vraiment d'autres alternatives que la voie aérienne. Maintenant, est-ce que je saute dans un avion pour un week-end, pour un oui, pour un non ? La réponse est bien évidemment non !

Votre empreinte carbone a pris un sacré coup lorsque vous présentiez "L'effet papillon", émission à dominante internationale, sur Canal+. Les aller-retours en avion étaient-ils un cas de conscience à l'époque pour vous ?
J'étais à l'antenne, je ne partais donc pas en reportage, ce sont les équipes de Capa (société de production, ndlr) qui étaient sur le terrain, sauf cas exceptionnel. Mais dans l'exercice de ces fonctions, c'est difficile de ne pas prendre l'avion. On a eu un gros impact carbone mais c'était pour la bonne cause. En fait, j'ai pris conscience des enjeux écologiques après un sujet de "L'effet papillon" diffusé il y a une quinzaine d'années. C'était au Kenya et il avait déjà trait à la guerre de l'eau. Des tribus se faisaient la guerre pour la répartition de l'eau, cela m'a beaucoup marquée.

Vous avez donc été pendant 22 ans une incarnation de Canal+. Pascal Praud a reçu sur CNews le 3 mars dernier Christian Gerondeau, connu pour ses prises de positions niant l'ampleur du dérèglement climatique...
S'il en reste, il faut les muséifier ! Je pense que c'est le seul (rires).

Qu'est-ce que cette chaîne, sur laquelle vous avez présenté les journaux du week-end quand elle s'appelait i-Télé, vous inspire ?
Rien, tout bonnement parce que je ne la regarde pas, pas plus que je ne regarde la télé en général. Sauf exception pour "C politique", "28 minutes" et "C ce soir" de Karim Rissouli, un ancien confrère de Canal+, qui tout comme Elisabeth Quin sont d'excellents journalistes.

Ils ont dit
"J'aimerais lancer sur LCP une collection des 'Grands entretiens' sur les 'nouveaux résistants'"
Daphné Roulier

Le PAF est en ébullition avec l'ouverture du mercato. Avez-vous des choses à nous annoncer pour la saison prochaine en radio ou en télé ?
Les places sont chères, elles ne sont pas forcément disponibles. Et à 55 ans, elles le sont encore moins. C'est une réalité, il faut l'accepter. Ou s'en amuser.

Vous continuerez "Les grands entretiens" sur LCP ?
Je vais poursuivre encore un peu la collection sur les avocats. Et j'aimerais lancer une collection sur les "nouveaux résistants", à l'image d'une Claire Nouvian, fondatrice de l'association Bloom, qui oeuvre pour la préservation des océans, ou d'une Golshifteh Farahani, qui est devenue, au prix du danger, l'icône de la libération des femmes en Iran, deux femmes très inspirantes. Je suis très heureuse en tout cas que l'émission ait reçu le prix du meilleur magazine de l'année (Lauriers de l'audiovisuel 2023). C'est une belle récompense !

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