Sur M6 dans Scènes de Ménages, sur Canal+ dans Maison Close et en ce moment au théâtre avec Thierry Lhermitte, Valérie Karsenti est sur tous les fronts. Et c'est dans le cadre de la promotion de la deuxième saison de Scènes de Ménages que Valérie Karsenti nous a accordé une interview.
Elle y évoque cette nouvelle saison dont l'audience ne cesse de grimper, et son personnage de Liliane, une femme naïve mais touchante, mais aussi un rôle très différent, celui de Hortense Gaillac dans Maison Close, la série événement de Canal+. Valérie Karsenti revient aussi sur ces acteurs qui en disent parfois trop au cours d'interviews, à l'image de Gérard Depardieu, ainsi que sur la réforme des retraites.
Vous revenez pour une deuxième saison de Scènes de Ménages. La première a très bien fonctionné puisqu'en moyenne ce sont 2,2 millions de téléspectateurs qui suivaient vos aventures sur M6. Vous vous attendiez à un tel succès ?
Je ne pense jamais à ça, à vrai dire. Quand j'étais sur la série, je pensais à créer un personnage qui soit à la fois touchant et drôle, à ce que ça fonctionne au maximum avec Frédéric Bouraly, qui joue mon mari dans la série. Et c'est en fait très peu de temps avant la sortie que je me suis posée la question de savoir si ça allait fonctionner. Mais en règle générale, quand moi je suis heureuse sur un projet, je me dis que ça va être bien. En tout cas, je suis plutôt confiante de nature. Après, les chiffres pour moi, c'est très abstrait. Mais je suis très contente parce que je sais que ça permet qu'on fasse une seconde saison. Là, ça a super bien démarré, hier soir, on était à 2,2 millions de téléspectateurs. C'est génial !
On a l'impression que les gens attendaient cette deuxième saison...
En fait, c'était court la première diffusion. Moi, je n'étais pas à Paris quand ça a été diffusé, j'étais à Lisbonne, je tournais Maison Close. C'était très court deux mois et demi, et en fait comme ça a beaucoup plu, les gens sont restés un peu sur leur faim. Sur Internet, sur mes mails, j'ai eu pleins plein de témoignages de gens qui m'ont dit que c'était super, qu'ils attendaient la suite.
« Je me suis beaucoup inspirée de certaines femmes que je vois dans le métro »
Pouvez-vous nous parler un peu de votre personnage, Liliane ?
Liliane c'est une petite femme toute simple. Je me suis beaucoup inspirée de certaines femmes que je vois dans le métro, tirées à quatre épingles, super féminines, maquillées, coiffées, des talons hauts, je me dis « mais comment elle font pour cavaler dans le métro avec ça ? », des petits tailleurs, parlant de leurs enfants, de leur boulot, qui essayent de tout tenir à bout de bras. Donc, c'est le rythme de vie de Liliane, elle ne s'arrête jamais et elle a une poésie incroyable pour moi, parce qu'elle a une petite vie qui n'est pas super rigolote mais elle a une espèce de bon fond et de volonté d'arranger les choses. Donc elle met une énergie incroyable pour faire que les choses soient jolies. Et moi, elle me fait rire évidemment, mais elle me touche aussi beaucoup.
Comment est-ce qu'on gère les situations ridicules dans lesquelles vous êtes mises sans cesse avec votre José ?
Je n'ai aucun sens du ridicule. C'est quelque chose que je n'ai pas du tout, c'est-à-dire que si je crois en la situation, même si elle est totalement folle ou à mon désavantage, ça ne me pose aucun problème, mais vraiment aucun. Mais même dans la vie d'ailleurs, je n'ai pas tellement le sens du ridicule, ni de la fragilité, ni de tout ça. Après, il y a des limites évidemment. Si, à un moment donné, ça me met mal à l'aise ou si je trouve que c'est un humour vulgaire, lourd, si ça ne me fait pas rire, je ne le ferai pas. Et sur cette série-là, les comédiens ont des séances de lecture et on a la possibilité de refuser les textes. C'est un luxe absolu et c'est surtout d'une très grande intelligence parce qu'on ne peut pas défendre un texte qui ne nous plaît pas, ce n'est pas possible.
Vous participez à la réécriture de certains textes donc ?
En fait il y a deux choses, il y a la sélection des textes et ceux qui partent en réécriture. Ensuite, avant de tourner, quand on nous donne les textes, avec Frédéric Bouraly, on se voit et on se les lit. Et quand ça ne fonctionne pas, on retravaille sur l'écriture. Ou alors ce qui arrive aussi, c'est que parfois, on improvise sur le plateau. C'est-à-dire que tout d'un coup, une situation nous inspire, et on peut extrapoler autour de la situation, on part de ce qui est écrit et puis on se laisse aller.
Dans la série, vous en faîtes parfois voir de toutes les couleurs à José.
Ah bon ? Vous trouvez ? Moi, je trouve que c'est lui qui m'en fait voir ! Non, ce qui est très très bien sur la seconde saison c'est qu'à la différence de la première saison, on avait quand même une Liliane qui était très en demande au niveau de sa libido et un José qui était quand même très roupillard. Ils en avaient un peu marre de ça, on avait fait un peu le tour et du coup, on s'est demandé comment réveiller un peu leur couple et ça nous amusait, ça fonctionne très bien les déguisements, les trucs comme ça et donc les auteurs se sont amusés à inventer autour de ça. Mais pour le chien, on s'amuse autant l'un que l'autre. C'est juste qu'à un moment donné, il me fait mal cet imbécile (rires).
« Je pense que c'était digne d'un long métrage, une merveille quoi ! »
En parallèle à Scènes de Ménages, les téléspectateurs ont également pu vous retrouver sur Canal+ dans Maison Close. C'est la première fois qu'une création originale Canal+ remporte un tel succès. À quoi attribuez-vous ce succès ?
Il y a deux raisons principales. Je pense que le sujet-même était suffisamment sulfureux pour que les gens aient très envie de regarder la série. Toute la communication a été extraordinaire, ils ont fait un travail absolument fabuleux et l'image est d'une telle beauté. La caméra de Mabrouk El Mechri est incroyable. Je pense que c'était digne d'un long métrage, une merveille quoi ! Après, ceux qui sont restés, c'est ceux qui ont aimé réellement la série. Ils ont accroché à l'histoire, aux personnages de femmes qui sont absolument fabuleux. Après il faut tenir, parce que c'est quand même très violent et extrêmement cruel, il y a un rythme aussi qui est lent. Il y a des gens qui ont trouvé ça trop lent.
Comment est-ce qu'on passe d'un rôle de femme un peu naïve à celui d'une femme autoritaire ?
On suit ce qui est écrit. C'est tout bête, c'est comme un musicien qui va à un moment donné jouer quelque chose de très léger et ensuite se retrouver dans un orchestre à jouer du Wagner. C'est exactement la même chose, après, il faut avoir le goût de la composition. Moi, j'adore composer. Je serai bien emmerdée si on me disait : "J'ai écrit un rôle pour toi, je me suis inspiré de toi, c'est toi". Je serai complètement angoissée.
Vous aimez vous insérer dans des personnages totalement différents de vous...
Forcément, j'y mets des choses personnelles dans les deux. Ça a été plus flagrant probablement pour moi avec Hortense parce que je suis allée chercher des choses douloureuses alors que Liliane, c'est plein d'inspiration différentes mais je ne peux pas dire que je sois allée chercher des choses personnelles. Mais surtout on s'inspire de ce qui est écrit. Pour Hortense, quand j'ai lu le premier scénario, j'ai vu sa relation aux autres, je me suis dit bon, elle terrifie tout le monde et puis j'ai vu comment elle était maltraitée, et je me suis d'accord, elle est terrifiée elle-même et j'ai basé tout le personnage là-dessus. Quelqu'un qui est terrifié et qui terrifie les autres par peur qu'on la blesse encore plus.
Hortense n'est jamais très tendre avec les filles mais pourtant on s'attache à elle. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?
J'espère qu'on s'attache à elle. Parce que s'il s'agissait seulement de faire la grosse méchante, ce ne serait pas vraiment intéressant. Hortense n'est pas tendre avec les filles pourquoi ? Parce que ce que vivent les filles, elle l'a vécu avant donc elle n'a pas de compassion. Elle ne se dit pas "oh, là, là, les pauvres chéries", elle en vient. Leur quotidien, ça a été son quotidien et même probablement pire. C'est une femme qui n'a plus de corps, alors qu'elle a été pute, c'est paradoxal. Elle est totalement armurée. Et en même temps, à l'intérieur, il y a, ce que dit son frère d'elle, il y a un "coeur de collégienne". Donc dans ce milieu-là, avoir un coeur de collégienne, ça veut dire être normalement détruite en très peu de temps. Elle a simplement une position de pouvoir qui lui permet pendant un temps pas très long de tenir, parce qu'on s'aperçoit que c'est son frère qui l'a mise là et que sans son frère, elle n'est rien.
« La seconde saison va être top top top ! »
Est-ce qu'il va y avoir une deuxième saison ?
Oui, je pense que ce sera le même décor. Maintenant il y a un énorme travail d'écriture. Je pense que Canal+ va tirer les leçons de la première saison et va améliorer ce qui doit l'être, ils vont être extrêmement vigilants et exigeants sur l'écriture. Donc là, ils vont prendre le temps. La seconde saison va être top top top ! Moi, je n'ai pas fait le tour d'Hortense, c'est un personnage suffisamment incroyable et vertigineux
Sur M6 avec Scènes de Ménages, sur Canal+ avec Maison Close, vous êtes également à l'affiche de "Grand Écart" au Théâtre de la Madeleine avec [personnalite_ozap%]Thierry Lhermite[/personnalite_ozap%] et François Feroleto. Quel rôle jouez-vous dans cette pièce ?
C'est une femme qui se bat. Elle vit depuis huit ans avec un homme qui va mal pour une raison que je ne peux pas vous dévoiler, principalement une histoire familiale, difficile, douloureuse. Ils sont au bord de se séparer, de divorcer et elle, elle se bat depuis plusieurs années pour que son mari se confronte à la réalité, pour qu'il rencontre quelqu'un. Et c'est pour ça qu'ils viennent rencontrer ce vieux danseur chorégraphe. Elle, elle a poussé son mari à venir pour que la rencontre se fasse. En même temps, c'est une comédie. C'est une pièce émouvante et très drôle.
Vous avez beaucoup plus de pièces de théâtres que de téléfilms ou films à votre actif. Doit-on en déduire que vous vous sentez mieux sur les planches ?
Non, ce qu'il faut en déduire c'est que pendant des années, j'ai tellement joué au théâtre, je jouais chaque saison, parfois des pièces qui duraient un an au théâtre, je n'avais pas la place pour tourner ailleurs Le métier est ainsi fait que si on ne force pas à ouvrir les portes un peu, il est quand même relativement cloisonné. Je me suis mise à tourner, il y a à peu près 5 ans, au début c'était des toutes petites choses. J'avais trois jours au cinéma, quelques jours dans les séries TV et je me suis dit "mais j'adore ça en fait".
Un grand nombre d'artistes pratiquent la langue de bois en interview, et d'autres sont au contraire sans aucune limite. Comment vous situez-vous par rapport à ça ?
Moi, j'adore parler de mon travail, et j'aime beaucoup rencontrer les gens. Mais j'essaie de fermer ma bouche sur beaucoup de sujets, notamment parce que je trouve que les choses sont toujours beaucoup plus compliquées que de simples réponses comme ça, et aussi parce que parfois les réponses sont raccourcies et que toute la complexité d'un raisonnement est réduite à une phrase. Donc je parle de ce que je connais, pour le reste j'ai des avis qui sont souvent pleins de doutes car je doute beaucoup.
« Je pense que c'est soit quelqu'un de très malheureux, soit quelqu'un de très en colère »
Du côté des artistes qui n'ont pas la langue dans leur poche, Gérard Depardieu notamment a beaucoup fait parler de lui. Vous pensez qu'il a raison de dire ce qu'il pense ?
Je pense que c'est soit quelqu'un de très malheureux, soit quelqu'un de très en colère et que moi je me pose seulement la question de savoir si, même si chacun pense ce qu'il veut, est-ce que c'est vraiment utile de le dire ? Je ne sais pas mais bon, il avait à ce moment-là suffisamment de colère en lui ou je ne sais pas quoi pour avoir absolument besoin de le dire. Moi je préfère parler des gens que j'aime, d'un spectacle que j'aime, je préfère parler des gens qui m'ont apporté que des gens qui m'ont enlevé. Je trouve ça plus intéressant. Je préfère passer plus de temps à dire des choses qui m'enrichissent et en plus j'adore les acteurs.
Vous parliez de sujets complexes, on est en pleine grève nationale depuis des semaines, la France est paralysée. Déjà, vous n'avez pas trop eu de problèmes pour venir ?
Je suis en scooter, donc on passe partout.
Et en tant que comédienne, est-ce qu'on se sent concerné par la réforme des retraites comme n'importe quel Français ?
Oui je me sens concernée parce que c'est un sujet qui m'intéresse. Si vous voulez, j'arrive enfin à vivre au jour le jour, moment après moment, j'ai deux enfants, un qui à 8 ans, l'autre qui en a 4. Je ne me projette absolument pas à cet âge-là. Je n'espère qu'une chose, c'est de continuer de travailler. Ce serait vous mentir que de vous dire que c'est une inquiétude pour moi, que c'est quelque chose qui me concerne. À l'inverse des gens qui ont des métiers pénibles, un acteur ne rêve que d'une chose, c'est de travailler. Maintenant, je connais aujourd'hui des acteurs qui ont plutôt bien travaillé toute leur vie et cotisé donc et qui sont bien emmerdés aujourd'hui.
Quels sont vos projets à venir ?
Pour l'instant, comme je suis engagée sur deux séries qui n'ont pas l'air de vouloir s'essouffler. Et moi non plus, pour l'instant je n'ai pas envie d'aller voir ailleurs. Donc en fait, j'ai été malheureusement obligée de refuser un projet au théâtre en janvier parce que je sais que je vais continuer de travailler. On va partir en croisière avec Scènes de Ménage, on va partir sur un bateau.