Après la séance de câlinothérapie fin janvier, les sanctions. Dans le cadre du traitement par les médias des attentats, le CSA a analysé 500 heures de programmes. Réuni en formation plénière mercredi 11 février, le CSA a relevé 36 manquements dont 15 ont donné lieu à mise en garde et 21, plus graves, ont justifié des mises en demeure.
LCI, chaîne la plus rappelée à l'ordre
Si l'on étudie l'ensemble de ces sanctions chaîne par chaîne (détails ci-dessous) on s'aperçoit qu'avec 3 mises en demeure et 2 mises en garde, LCI est la chaîne la plus rappelée à l'ordre par le CSA. TF1, France 2 et BFMTV suivent avec 4 sanctions chacune. Parmi les chaînes ayant octroyé une large place aux évènements, iTELE et France 24 sont les moins sanctionnées (3 avertissements chacune). Mais, selon le CSA, la chaîne d'info la plus raisonnable a été Euronews qui n'est montrée du doigt qu'à deux reprises. Canal+, France 3 et France 5, qui n'ont consacré que des temps réduits à l'actualité, n'écopent que de cartons jaunes.
Moins embarrassées par des problèmes d'image, les radios sont toutefois largement sanctionnées. 2 mises en demeure pour RMC, la radio la plus réprimandée. Comme la plupart des médias, Europe 1, France info, France Inter, RFI et RTL, sont tous mis en demeure une fois pour avoir annoncé que des affrontements contre les terroristes avaient lieu à Dammartin-en-Goële alors qu'Amedy Coulibaly était encore retranché à la Porte de Vincennes.
1. La diffusion d'images du policier abattu par les terroristes
Chaînes sanctionnées : France 24 (mise en demeure) et France 5 (mise en garde).
Le Conseil a examiné la séquence de l'assassinat du policier Ahmed Merabet par les terroristes, diffusée par la chaîne France 24. "Même si l'instant précis de la mort n'a pas été montré, cette séquence faisait entendre les détonations d'arme à feu ainsi que la voix de la victime et exposait son visage et sa situation de détresse. Elle a porté atteinte au respect de la dignité de la personne humaine", note le CSA.
France 5 écope aussi d'une sanction pour avoir diffusé la Une d'un journal britannique, le Daily News, montrant l'image du policier à terre, "dans une situation de détresse, non floutée, quelques secondes avant d'être abattu, (qui) méconnaissait également le respect de la dignité de la personne humaine".
2. L'identification des frères Kouachi
Chaînes sanctionnées : iTELE (mise en demeure) et LCI (mise en demeure).
Le Conseil a considéré que ces deux chaînes avaient diffusé des informations concernant l'identification de Saïd et Chérif Kouachi "avant la diffusion de l'appel à témoins par la Préfecture de police et ce en dépit des demandes précises et insistantes du procureur de la République".
3. La divulgation de l'identité d'une personne mise en cause comme étant l'un des terroristes
Chaînes sanctionnées : BFMTV, France 2, iTELE, LCI et TF1 (mises en garde).
Le Conseil a considéré qu'en désignant une personne comme étant l'un des terroristes recherchés par les autorités, "même en entourant cette information de certaines précautions", les chaînes, ont "non seulement manqué de mesure dans le traitement de l'enquête, mais encore pris le risque d'alimenter les tensions dans la population à partir d'une allégation qui s'est révélée inexacte". Il s'agissait du lycéen, qui était en cours au moment du drame.
4. La diffusion d'images ou d'informations concernant le déroulement des opérations en cours, alors que les terroristes étaient encore retranchés
Chaînes sanctionnées : BFMTV, Canal+, Euronews, France 2, France 24, LCI et TF1 (mise en garde)
Ces chaînes ont diffusé des informations et des images "indiquant notamment le déploiement des forces de l'ordre, le positionnement exact de certaines d'entre elles ou encore la stratégie mise en place, (ce qui) aurait pu être préjudiciable au déroulement des opérations ainsi qu'à la sécurité des otages et des membres des forces de l'ordre".
5. L'annonce que des affrontements contre les terroristes avaient lieu à Dammartin-en-Goële alors qu'Amedy Coulibaly était encore retranché à la Porte de Vincennes
Chaîne sanctionnées : BFMTV, Euronews, France 2, France 24, iTELE, LCI, TF1, Europe 1, France Info, France inter, RFI, RMC et RTL (mises en demeure)
Le CSA considère que "la divulgation de cette information aurait pu avoir des conséquences dramatiques pour les otages de l'Hyper Cacher de la Porte de Vincennes, dans la mesure où Amedy Coulibaly avait déclaré lier leur sort à celui de ses complices de Dammartin-en-Goële".
6. La diffusion d'informations concernant la présence de personnes cachées dans les lieux de retranchement des terroristes
Chaînes sanctionnées : France 2, TF1 et RMC, BFMTV et LCI (mise en demeure)
Le Conseil a relevé que France 2, TF1 et RMC ont signalé la présence d'une personne qui était parvenue à se cacher dans l'imprimerie où Saïd et Chérif Kouachi s'étaient retranchés. Il constate aussi que BFMTV et LCI ont émis l'hypothèse qu'une ou plusieurs personnes s'étaient réfugiées dans une chambre froide ou dans une réserve du magasin Hyper Cacher où Amedy Coulibaly retenait ses otages. Le Conseil considère "que la diffusion de ces informations, à l'heure où les terroristes pouvaient encore agir, était susceptible de menacer gravement la sécurité des personnes retenues dans les lieux".
7. La diffusion des images de l'assaut à l'Hyper Cacher de la Porte de Vincennes
Chaînes sanctionnées : France 3 et Canal+ (mise en garde)
Ces chaînes ont diffusé une vidéo montrant l'assaut mené contre l'Hyper Cacher, y compris les tirs mortels sur le terroriste alors qu'il affrontait les forces de l'ordre. Pour le CSA, "des images insistantes, susceptibles de nourrir les tensions et les antagonismes, pouvaient contribuer à troubler l'ordre public".