En direct de Cannes. Ils n'ont pas de stars au générique, le nom de leurs réalisateurs est aussi difficile à écrire qu'à retenir pour les non-initiés et en étant présentés le dernier jour de la compétition, il faut reconnaître qu'on ne savait pas vraiment ce qu'il fallait attendre d'eux. Mais heureuse nouvelle, bien que très différents dans leur genre, Un garçon fragile - Le projet Frankenstein de Kornel Mundruczo et L'exode : Soleil Trompeur 2 de Nikita Mikhalkov ont un point commun. Ils permettent tous deux au Festival de se terminer sur une note positive et ils relèvent le niveau d'une sélection 2010 bien morose, qui n'aura vu aucun film faire l'unanimité ou se détacher de ses concurrents comme avait pu le faire Un Prophète (pour ne citer que lui) l'an passé. On souhaite alors bien du plaisir au Jury pour établir son Palmarès et on attend leur verdict ce soir avec impatience... La réalisatrice Julie Bertuccelli et Charlotte Gainsbourg auront ensuite l'honneur de conclure ce Festival avec L'arbre. Un très beau film, poétique et émouvant, qui aurait pu créer la surprise s'il s'était retrouvé en compétition...
Les Films
Ils ont été projetés hier, et on ne parle plus que d'eux.
Un garçon fragile - Le projet Frankenstein : Pour sa deuxième sélection en compétition officielle après Delta en 2008, le réalisateur hongrois Kornel Mundruczo était attendu au tournant avec sa très libre adaptation moderne de Frankenstein. Bien qu'inégale dans sa deuxième partie, le film réussit son pari. Il intrigue, amuse, dérange, fascine et mêle habilement les genres. On a la certitude que le jeune cinéaste reviendra très bientôt sur la Croisette, qu'il figure ou non ce soir au Palmarès. Et ça, c'est déjà une bonne nouvelle...
*Ses points forts : Dès sa scène d'ouverture avec un long plan séquence d'une redoutable et intelligente simplicité, on sait que Kornel Mundruczo sait à la perfection le chemin sur lequel il va nous promener. Sa mise en scène, son humour noir, la froideur de sa violence et son atmosphère oppressante sont les clefs d'une adaptation originale et réussie du célèbre Frankenstein. Mais ici, pas de monstre, puisque le "Frankenstein" en question est un jeune garçon qui va rencontrer pour la première fois ses parents après 17 années passées dans un orphelinat... Le cinéaste hongrois se défait de l'oeuvre dont il s'inspire et parvient à donner à l'immeuble inhabité dans lequel les personnages vivent la même force glaçante que celle d'un manoir hanté. Réalisateur, mais aussi acteur principal, Kornel Mundruczo démontre un jeu sobre et efficace. A l'image de ses partenaires.
*Ses points faibles : C'est avant tout dans sa deuxième partie que le film accuse une baisse de régime avec une fin qui traîne en longueur. Dommage également que le réalisateur hongrois n'ait pas souhaité creuser un peu plus la psychologie de son jeune héros pour le moins énigmatique. Et les fans du Frankestein original regretteront sans doute que Kornel Mundruczo ne leur ait pas le clin d'oeil de glisser dans son adaptation la célèbre réplique « It's alive ! »...
L'Exode - Soleil Trompeur : Avec le Grand Prix du Jury récolté pour Soleil Trompeur en 1994, on pouvait légitimement se demander si le réalisateur russe Nikita Mikhalkov n'avait pas vu trop grand en s'attaquant à sa suite, seize ans plus tard. En livrant un drame historique spectaculaire sous fond de deuxième guerre mondiale, il offre véritablement un film à grand spectacle. Et cette suite qui multiplie les scènes de batailles dans un vacarme explosif a réveillé une Croisette un peu endormie. Certains pourront reprocher au cinéaste de trop en faire avec ce qu'on pourra aussi voir comme un "western moderne". Mais s'il pâtit de quelques longueurs, le résultat s'avère diablement efficace.
*Ses points forts : La reconstitution des batailles et des joutes armées entre soldats russes et nazis apporte une force à ce film qui nous montre l'horreur de la guerre sans se cacher derrière des artifices. Du sang, des larmes, des corps mutilés, des explosions. La guerre fait des ravages et Nikita Mikhalkov s'emploie à la filmer avec une vérité saisissante. Sa mise en scène et le choix de ses plans impressionnent. Portée par une musique qui soutient l'émotion d'un drame qui a pour fil rouge le combat d'une femme à la recherche de son père, ce deuxième volet, sorte d'Il faut sauver le soldat Ryan russe, se conclut avec un dernier plan qui montre que le cinéaste est aussi habile à orchestrer qu'à nous émouvoir avec pudeur.
*Ses points faibles : Nikita Mikhalkov semble se faire plaisir en cherchant à aller toujours plus loin dans la reconstitution des scènes de combats. Mais à trop vouloir faire durer ce plaisir, il fait parfois traîner en longueur certains passages qui auraient pu disparaître au montage sans que cela ne change la donne. Bâti sur un scénario assez simple, le film a aussi un défaut majeur qui ne jouera pas en sa faveur dans l'optique de figurer au Palmarès. N'étant que le deuxième volet d'un tryptique, il est doté d'une fin très ouverte. Et il se pourrait bien que certains ne puissent apprécier cette trilogie qu'en connaissant le dénouement final.
Et aujourd'hui
L'arbre : Après avoir remporté le Prix d'interprétation féminine l'an passé à Cannes, Charlotte Gainsbourg sera de nouveau présente lors de la soirée de clôture. Elle tient en effet le premier rôle de L'Arbre de Julie Bertuccelli projeté Hors-Compétition. La réalisatrice de Depuis qu'Otar est parti plongera les festivalier dans un drame tourné en Australie. L'histoire ? Dawn et Peter vivent heureux avec leurs quatre enfants à l’ombre de leur gigantesque figuier. Lorsque Peter meurt brutalement, chacun, pour continuer à vivre, réagit à sa manière. Simone, la petite fille de 8 ans, croit que son père vit à présent dans l’arbre. Un jour, elle initie Dawn à son secret...
Notre avis : Film émouvant et poétique, L'Arbre confirme les talents d'une réalisatrice qui fait passer l'émotion sans jamais sombrer dans le mélo. La beauté des décors naturels australiens, la fascination porté à cet arbre comme métaphore de la perte de l'être cher, la complicité évidente des acteurs et la justesse de leur jeu font de ce drame intime le film que Cannes aurait dû mettre dans sa sélection. Et c'est à se demander ce que faisaient les sélectionneurs quand ils ont vu le film...
Des Prix, toujours des Prix...
Un Certain Regard
*La présidente - la réalisatrice Claire Denis - et son Jury ont rendu leur verdict. Ils ont décerné le Prix Un Certain Regard au réalisateur coréen Hong Sang-soo pour son film Ha Ha Ha. Un Prix spécial du Jury est également venu récompenser les frères Diego et Daniel Vega pour leur film péruvien Octubre. Quant au trio d'actrices du long-métrage Los Labios, elles se sont vues remettre un prix collectif pour leurs interprétations.
Prix de la Jeunesse
*Depuis 29 ans, un Jury jeune, composé de 7 jurés, remet chaque année son prix parmi une sélection de films de la compétition officielle et des sélections parallèles. Parrainé pour cette édition 2010 par la comédienne Mathilda May, le jury jeune a décidé de récompenser cette année Copie Conforme d'Abbas Kiarostami. Il a également remis le Prix Regard Jeunes qui récompense un premier ou deuxième film à Xavier Dolan pour Les amours imaginaires. L'an passé, pour son premier film, J'ai tué ma mère, Xavier Dolan avait raflé pas moins de trois prix différents à La Quinzaine des Réalisateurs...
Prix oecuménique
*C'était presqu'une évidence tant le sujet du film était dans la lignée de ce prix. C'est Xavier Beauvois pour le film Des Dieux et des Hommes qui a remporté le Prix oecuménique 2010, succédant ainsi à Ken Loach et son Looking for Eric en 2009. A noter que le jury a également décerné deux mentions spéciales à Poetry de Lee Chang-Dong et à Another Year de Mike Leigh.
Nos Pronostics
Au jeu des pronostics, voilà le Palmarès d'Ozap pour ce Festival de Cannes 2010. Mais comptons sur Tim Burton et son Jury pour nous surprendre dans quelques heures.
Palme d’Or : Copie Conforme de Abbas Kiarostami
Grand Prix du Jury : Another Year de Mike Leigh
Prix d’interprétation masculine : Javier Bardem pour Biutiful
Prix d’interprétation féminine : Juliette Binoche pour Copie Conforme
Prix de la mise en scène : Nikita Mikhalkov pour L'exode - Soleil Trompeur 2
Prix du scénario : Route Irish de Ken Loach
Prix du Jury : Ex Aequo - Tournée de Mathieu Amalric et Kornel Mundruczo pour Un garçon fragile – Le projet Frankenstein
Retrouvez dès demain de nouvelles infos inédites et des critiques.
Aujourd'hui à Cannes : Les derniers films en compétition relèvent enfin le niveau
Publié le 23 mai 2010 à 09:51
Bulletin du dimanche 23 mai 2010.
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