Interview
F. Guilbeau et T. Langlois (France 3) : "La dimension régionale de nos programmes nationaux doit être plus marquée"
Publié le 28 août 2012 à 17:31
Par Prune P.
Pour puremedias.com, François Guilbeau, le directeur de France 3 et Thierry Langlois, le directeur des programmes, détaillent leurs choix et la stratégie de la chaîne pour la saison 2012/2013.
François Guilbeau et Thierry Langlois (France 3). François Guilbeau et Thierry Langlois (France 3).© FTV/Montage PM.com
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Ce matin, France 3 présentait officiellement sa grille 2012/2013 lors de sa conférence de presse de rentrée. Parmi les nouveautés de la chaîne, le lancement d'une quotidienne sur la météo à la place de "Derrick", une nouvelle version de "Thalassa" et un nouveau magazine pour Mireille Dumas et Franz-Olivier Giesbert. François Guilbeau, le directeur de France 3 et Thierry Langlois, le directeur des programmes, détaillent leurs choix et la stratégie de la chaîne. Alors que la saison s'annonce très concurrentielle, ils insistent sur la dimension régionale de leurs programmes.

Propos recueillis par Julien Lalande et Benoît Daragon

puremedias.com : Quelles sont les principales nouveautés de la saison prochaine en prime ?

Thierry Langlois : Nous avons deux gros chantiers. On a retravaillé la case du lundi où nous proposerons des documentaires et un magazine mensuel autour de la thématique du vivre ensemble avec une vraie cohérence dans les propositions éditoriales. Nous aurons notamment une collection de Mireille Dumas qui s'intitule "Un héritage" autour de la transmission du nom, du savoir, d'un métier. Nous aurons également des documents sur la santé au sens large, l'éducation, les secours, le traitement de l'obésité avec de nouvelles techniques, etc. Et une fois par mois, le nouveau magazine "Le monde d'après" présenté par Franz-Olivier Giesbert. Là aussi, on prend un risque, on le sait. On va sur un magazine très exigeant, dont on sait qu'on va traiter de sujets qui peuvent paraître exigeants (le premier numéro s'intéressera aux banques). On va essayer d'être très pédagogique et d'adopter une dimension prospective.

Et votre second chantier ?

TL : Celui du vendredi soir, avec un "Thalassa" nouvelle vague que l'on retrouvera trois fois par mois sous trois formules différentes, en alternance avec "Faut pas rêver". "Thalassa" aura donc trois couleurs : une première qu'on appelle la mer dans tous ses états, dans laquelle on va introduire des documentaires de 110 minutes sur le tour du monde des tempêtes, l'environnement, l'écologie, les mammifères marins... Une deuxième formule concernera les grandes villes maritimes pour laquelle Georges Pernoud ouvrira l'émission et lancera Laurent Bignolas qui aura été à la découverte de cette ville. Enfin, troisième formule, "La France vue de la mer" qui nous emmènera à la découverte des plus beaux paysages et des habitants d'une région française.

"Je pense qu'on va recevoir quelques sacs postaux pour nous demander ce qu'on a fait de Derrick"

Autre nouveauté, vos après-midis. "Derrick" va disparaître au profit d'une nouvelle émission à 13h. Quel sera le concept de "Météo à la carte" ?

TL : "Derrick" a servi la chaîne pendant très longtemps et avec des audiences très satisfaisantes. Je pense qu'on va recevoir quelques sacs postaux pour nous demander ce qu'on a fait de "Derrick" ! Mais "Derrick" reviendra sur notre antenne, dans une autre case. En ce qui concerne "Météo à la carte", il s'agira d'une émission en direct, du lundi en vendredi, présenté par Laurent Romejko, accompagné de Marine Vignes. On la veut très rubriquée, très interactive, très service public. La case du 13h est depuis longtemps sinistrée chez nous. Nous avons pensé à la météo puisqu'on connaît le goût du public pour cette thématique qui va nous permettre d'avoir une coloration régionale extrêmement forte. C'est un de nos axes de travail pour cette grille de rentrée : on veut que la dimension régionale de nos programmes nationaux soit plus marquée.

François Guilbeau : La météo, c'est une porte ouverte sur un tas de sujets qui sont liés ou qui sont des conséquences de la météo.

TL : La santé, le jardin, la culture...

FG : La météo a beaucoup d'impact.

TL : L'histoire ! La météo a eu une incidence sur beaucoup d'événements historiques.

Deuxième nouveauté de l'après-midi, "Si près de chez vous". France 3 se lance à son tour dans la scripted-reality avec une petite distinction par rapport à vos petits camarades, c'est que vous, ce sera un polar.

TL : On est sur une case historiquement policière pour France 3 donc on s'inscrit là-dedans. Nous proposerons deux épisodes de 26 minutes chaque jour. On est dans de la fiction dite low-cost ou à coût maîtrisé. Il y a un débat avec la profession sur nos motivations réelles... Il faut être très clair : d'abord, sur la question qui a agité les organisations professionnelles, à savoir est-ce qu'ils vont remplir leurs obligations de production avec ce programme ? A cela, nous avons répondu : le budget qui sert à financer ce programme n'est pas pris sur le budget fiction, donc il n'est pas pris sur les investissements création de France 3, c'est du redéploiement sur le programme dit de flux qui nous a permis de financer ces programmes. En France, tout le monde dit qu'il n'y a pas assez de volume produit en fiction. Ce n'est pas la seule réponse à apporter, mais c'en est une malgré tout. Il n'y a pas de raison de la sous-estimer. On a fait un petit calcul : 750 comédiens, 35 auteurs, 14 réalisateurs...

Côtés projets, vous prévoyez toujours de lancer un quatrième jeu l'après-midi ?

TL : Oui, on compte le lancer pour la Toussaint. Deux formats restent en compétition : un format étranger et une création originale. Nous allons tourner des pilotes et trancher. Les deux nous plaisent, les deux sont évidemment sur une tonalité culture générale qui reste en phase avec ce qu'on est.

Après l'arrêt de l'émission de Cyril Viguier, vous aviez réfléchi à lancer un nouveau talk show avant d'abandonner l'idée. Pourquoi ? Pour des motifs économiques ?

TL : Oui. Nous avons préféré renforcer notre fond de grille, notre 13/15 heures notamment. A partir de là, il a fallu redéployer nos ressources. Le fond de grille de France 3, c'est une tranche sur laquelle historiquement la chaîne a toujours peu investi. Accessoirement, au niveau du groupe, au plan de l'harmonisation, c'est France 2 qui va être sur une émission d'accueil.

"Notre grille d'été a mieux fonctionné que l'an dernier"

Vous n'estimez pas que ce genre-là, très identifiant pour une chaîne, est un manque pour une chaîne généraliste comme France 3 ? Notamment pour attirer une audience plus jeune ?

TL : Dans un premier temps, on avait envisagé ça car on avait la volonté de moderniser l'image un peu passéiste de France 3. On a travaillé beaucoup la forme, la modernité et l'interactivité de notre grille. Mais voilà, on ne peut pas tout faire donc on a des choix à faire.

Où en sont vos négociations avec l'exécutif pour ne plus retransmettre les questions au gouvernement l'après-midi ?

TL : C'est un sujet qu'on continue à poser parce qu'il est légitime. Pourquoi diffuserait-on ces retransmissions alors qu'il y a désormais des chaînes parlementaires de plein exercice aujourd'hui ?

Compte tenu de l'environnement concurrentiel accru, quels sont les objectifs de France 3 pour cette saison à venir ?

FG : Notre premier objectif, c'était déjà d'arrêter la baisse des audiences de France 3. Ca fait plusieurs exercices qu'on perd en gros un point de part de marché. Sur le premier semestre, de janvier à juin, on y est parvenu puisque est au même niveau que septembre-décembre 2011. Evidemment, on ne va pas le cacher, les Jeux Olympiques nous ont aidés mais même sans eux, notre grille d'été a mieux fonctionné que l'an dernier. Fin août, on sera à 9,8% sur les huit premiers mois de l'année, contre 9,7% en 2011.

TL : Ces dernières années, France 3 a perdu sur son coeur de cible, les plus de 50 ans. Nous sommes attaqués, y compris par les nouvelles entrantes, TMC et Direct 8 par exemple. Donc notre objectif est vraiment de consolider notre performance sur le coeur de cible de la chaîne et après, essayer d'élargir aux 40-50 ans. On ne va pas mettre un grand coup de barre à droite ou à gauche pour essayer d'aller chercher des 25-49.

A l'instar de France 2, le budget alloué aux programmes de France 3 sera-t-il en baisse cette saison ?

TL : On s'attend à avoir une année 2013 compliquée budgétairement. On a déclenché absolument toutes les clauses sur tous les contrats qui nous le permettaient pour renégocier à la baisse et on continue. Sur l'année 2012, on a renégocié les clauses de sortie en fin d'année dernière pour pouvoir soit arrêter, soit renégocier.

FG : On ne s'attend pas à avoir une augmentation de nos ressources et c'est un euphémisme. Donc on gère en bon père de famille. On exploite au maximum nos possibilités de rediffusions. On a des cases de multi-diffusions qui ne nous coûtent rien (le dimanche après-midi notamment avec la rediffusion de "Plus belle la vie", NDLR).

"6 nouvelles chaînes, c'est une déstabilisation considérable du marché"

Venons-en à l'information de France 3. La rédaction nationale a voté une motion de défiance contre Thierry Thuillier, le patron de l'information de France 3. Selon les syndicats, pour résumer, l'info de France 3 serait l'enfant pauvre de France Télévisions.

FG : Une partie de la rédaction nationale de France 3 considérait qu'elle devait faire la même chose que France 2. Or, nous, on pense que si on veut, dans un groupe, toucher le plus large public, il faut avoir des offres différenciées et des éditions qui soient bien identifiées avec des lignes éventuellement un peu différentes. On considère aussi que nous devons faire parfois des économies. France 2 et France 3 ont désormais les mêmes outils techniques. Ca n'a aucune influence sur l'éditorial. Il y en a certains dans la rédaction qui ont interprété ça comme une volonté de réduire la voilure et de réduire l'autonomie de la Trois. Or, ce n'est pas le cas. Ce qu'on veut c'est au contraire avoir une offre qui soit mieux identifiée de celle de France 2 et on pense que c'est comme ça qu'on va mieux asseoir les éditions de France 3. Les faits nous donnent plutôt raison mais on n'a pas encore réussi aujourd'hui à convaincre et à rassurer la rédaction.

Certaines dénoncent aussi "l'omniprésence" des faits divers dans vos JT ou encore la couverture insuffisante des sujets internationaux...

FG : On ne traite pas plus de faits divers qu'on en traitait avant. En revanche, nous avons essayé de concevoir le 12/13 et le 19/20 comme des tranches plus homogènes qui sont, c'est vrai, très marquées par une offre régionale. Cela ne nous a pas paru très cohérent d'avoir une offre qui serait très internationale ou très magazine. Et je pense que le public l'a identifié, ça fonctionne plutôt pas mal. A l'inverse, notre "Soir 3" est très tourné vers l'international.

Avec l'arrivée de 6 nouvelles chaînes fin 2012 et l'incursion du géant Canal+ dans le gratuit, considérez-vous cette saison comme la plus concurrentielle que le PAF ait connu ?

TL : Oui, chaque année un peu plus, effectivement. Je ne connais pas énormément de secteurs, y compris dans la grande industrie, qui ont connu autant de modifications aussi importantes qu'on en a connues ces dernières années. Malgré cette déstabilisation considérable du marché, on est encore vivant et on a bien l'intention de tirer notre épingle du jeu via la différenciation. Après, ces nouvelles chaînes posent plusieurs problèmes, en matière de droits par exemple. Aujourd'hui, quand France 3 produit une fiction, on finance entre 80% et 90% de l'oeuvre. Après la diffusion, les producteurs vont chercher une "petite" chaîne de la TNT qui va apporter royalement, sur une fiction, 9.000 euros tandis que nous, c'est entre 1,6 et 1,8 million d'apport. Pour avoir plus de diffusion que ce qu'on a nous ! Il y a donc un petit problème. Nous on a le droit à trois diffusions la plupart du temps alors que ces chaînes ont droit jusqu'à 15 multi-diffusions ! Donc, en gros, quand elles viennent au plan de financement, elles veulent s'inscrire après notre première diffusion. On n'est pas contre ça mais nous souhaitons que leur apport et leurs droits soient au pro-rata de chacun.

TF1 souhaite que lorsqu'elle finance une fiction, elle lui appartienne. Vous souhaitez la même chose ?

TL : Nous ne sommes pas sur cette ligne. Nous voulons une discussion au niveau de l'apport des nouvelles chaînes de la TNT. Mais c'est vrai qu'au Royaume-Uni, la BBC a tous les droits sur ses programmes, y compris ceux de les commercialiser. Nous, on n'a pas le droit, on achète deux ou trois droits de diffusion. Et une fois qu'on les a consommés, le programme ne nous appartient plus.

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