Me voilà de retour sur le sol français. Et il faut dire que je ne suis pas déçue du voyage : accueil climatique hors du commun, périph engorgé, pub pour les flatulences féminines sur Chérie FM. Ah, Paris, tu m'avais manqué. Hormis ces attraits touristiques alléchants, j'ai quand même une bonne raison d'être dans la capitale : la journée de promotion internationale pour le film Les aventures de Tintin : le secret de la Licorne. Steven Spielberg, Peter Jackson, Gad Elmaleh : oui je ne pensais pas un jour prononcer ces trois noms dans la même phrase. Ou alors dans une phrase du genre "C'est Peter Jackson, Steven Spielberg et Gad Elmaleh qui arrivent au paradis...".
Une journée de promo internationale, c'est 100 journalistes de 21 pays différents, qui vous donnent l'impression d'assister à l'Eurovision. Je suis en avance. Enfin je crois. L'"hospitality room" ou "chambre de l'hospitalité", est pleine. Je regarde ma montre. 8h43. La projo est à 10h... Les journalistes étrangers sont-ils si pointilleux que ça? Non. Ce n'est pas une armée de journalistes. C'est bien pire (voix de bande annonce américaine): ils sont cinquante. Ils sont surentrainés. Ils peuvent cesser de s'alimenter pendant 24 heures. Ils ont des talkie walkies. Ce sont... les attachés de presse. Il y a l'attaché de presse qui t'accompagne dans le couloir, l'attaché de presse qui te récupère à l'autre bout du couloir, l'attaché de presse qui te tient la porte, l'attaché de presse qui te donne un dossier de presse, l'attaché de presse qui vérifie que tu as bien lu le dossier de presse. Je prends un croissant. J'ai peur de me faire arrêter pour attentat à la miette. Cellule de crise : un cerbère a remarqué que sa carte de chambre ne marchait pas. Tout le monde vérifie sa carte de chambre. Je me sens comme un énorme éléphant dans un minuscule magasin de porcelaine.
9h45. Je signe le fameux embargo qui m'interdit de parler des 10mn de "Tintin" que je vais voir. Je me demande toujours ce qui se passerait si je disais par exemple à ma mère que le film était "super" : est-ce qu'on commanditerait mon meurtre entraînant ainsi la démission du numéro 1 de Scotland Yard et l'inquiétude de David Cameron ? Est-ce que "super" est considéré comme un avis critique ? Est-ce que ma mère est considérée comme un media non précisé lors de la demande d'interview ? D'ailleurs, c'est toujours très frustrant de voir un bout de film. Officiellement c'est pour créer le suspens. Officieusement c'est que le film n'est pas fini. C'est un peu comme si vous humiez un bon rôti de porc et qu'on vous le servait 6 mois après. Oui vous n'en avez plus forcément envie, surtout que c'est un plat de saison.
9h55. La sécurité est tellement bien organisée qu'elle confisque les téléphones portables à 5mn du début de la projo. En même temps, il faut être vraiment très con pour shooter un film en 3D avec son téléphone portable. En même temps, mon téléphone portable fait à peine des photos pourries alors...
10h. Tintin tin tiiiiiiiiiiin. Tintin tin tiiiiiiinnnn. Ah c'est déjà fini.
10h30. Steven Spielberg est en face de moi, Steven Spielberg est en face de moi...J'ai beau me répéter cette phrase tout au long de la conférence de presse, j'ai l'impression que Steven Spielberg n'est pas en face de moi. Je le prends en photo pour être sûre de me rappeler qu'il était en face de moi.
10h32. Tiens, Peter Jackson a maigri. J'hésite à lui demander s'il a fait le régime Dukan bien que cette question n'ait absolument aucun rapport avec le film.
10h40. Ça parle "capture motion". Je n'ai toujours pas très bien compris comment ça marchait mais je n'ose demander à Steven de me ré-expliquer. C'est pas grave, je vérifierai sur Google.
10h45. Gad fait une blague. Un journaliste français rit dans la salle. Je crois que c'est moi.
10h50. LE journaliste belge demande si l'avant-première mondiale du film aura lieu en Belgique. Tu m'étonnes qu'il n'y ait qu'un journaliste belge dans la salle...
11h. Fin de la conf de presse. Je me demande combien pourrait valoir le verre d'eau de Steven Spielberg sur ebay. Au moment où je tente de m'en emparer, l'attaché de presse qui s'occupe des verres d'eau me jettent un regard noir du genre "n'essaye même pas". J'me sens comme un éléphant qui vient de se faire gronder. Shame...
