On ne change pas une recette qui marche. Comme il l'a fait avec la radio RMC, la chaîne d'info BFMTV et ses déclinaisons locales comme BFM Paris, Alain Weill a une nouvelle fois décidé d'aller chercher l'inspiration dans le monde anglo-saxon pour développer l'un de ses actifs : "L'Express". C'est ainsi qu'il compte transformer à partir de la semaine prochaine le titre qu'il a racheté à Altice en février dernier en un "The Economist" à la française.
Pour devenir l'équivalent français de cet hebdomadaire britannique libéral chéri par les élites anglo-saxonnes, "L'Express" va fondre avec moins de rubriques, moins de photographies et de pages, au profit d'une nouvelle formule recentrée sur des contenus longs, "à forte valeur ajoutée", et abordant trois principales thématiques : la politique, l'économie et l'international. "On ne peut pas être bon sur tous les thèmes", a justifié Alain Weill ce matin face à la presse médias, promettant la fin des Unes sur l'immobilier ou le vin. La nouvelle maquette, très inspirée de celle de "The Economist", promet quant à elle de faire la part belle aux infographies, au dessin et aux idées "libérales et d'ouverture".
Des indiscrets envoyés par Whatsapp, des articles tous disponibles en podcast
"Nous voulons un journal premium et d'expertise", résume Eric Chol, le nouveau patron de la rédaction de "L'Express", débauché de "Courrier international", et qui promet de faire "bouger les lignes". Pour ce faire, la nouvelle direction a renouvelé et réduit une rédaction qui ne compte plus qu'une centaine de journalistes, dont quelques nouvelles plumes connues comme Marion Van Renterghem, ex-figure du "Monde". A l'instar de "L'Opinion", "L'Express" se positionne résolument comme un journal à destination des décideurs français, comme francophone, public auquel seront régulièrement proposés des sujets qui le concernent.
Au rayon des nouveautés, on notera l'envoi aux abonnés de "L'Express" via des groupes WhatsApp et Messenger des indiscrets dénichés par la rédaction, qui disparaîtront en revanche des premières pages de l'hebdomadaire. "Avec le développement du numérique et des chaînes info, elles étaient souvent éventées depuis plusieurs jours quand on les lisait dans la version print", justifie Clément Delpirou, directeur des activités presse d'Altice. Autre innovation de la nouvelle formule, la mise à disposition de l'intégralité des articles de l'hebdomadaire en format podcast, à l'image de ce que propose le "Washington Post" aux Etats-Unis et un certain... "The Economist" outre-Manche. "Nous proposerons 5h30 d'écoute et 60 articles par semaine", détaille Clément Delpirou. Pour fidéliser ses lecteurs, "L'Express" proposera aussi régulièrement à ses abonnés des "Master class", avec une première conférence animée par le général retraité, Pierre de Villiers.
200.000 abonnés visés d'ici 2023
Les abonnés justement, seront au coeur de la stratégie économique du journal, dont le prix en kiosques restera fixé à 4,90 euros. Pour revenir à l'équilibre "à court terme" et même "doubler le chiffre d'affaires à terme", Alain Weill et ses équipes visent 200.000 abonnés d'ici le 70e anniversaire du journal, en 2023, alors que le titre en revendique pour l'instant près de 120.000. Pour y parvenir, la nouvelle direction proposera une offre numérique et audio à 9,90 euros, une offre print au même prix, et une offre combinant les deux premières à 11,90 euros.
Afin de mettre toutes les chances de son côté, Altice compte enfin lancer une vaste campagne de communication autour de la nouvelle formule du titre de presse, à la radio comme à la télévision. "J'ai l'impression que nous nous attaquons à un marché en pleine croissance : celui du contenu payant", veut croire Alain Weill, assurant que les gens sont désormais prêts "à payer du contenu de qualité, contrairement à il y a encore quelques années". L'avenir dira s'il avait vu juste.