Hier, dans une interview à puremedias.com, Laurence Bloch, la patronne de France Inter, a officialisé l'arrêt de "Là-bas si j'y suis", la quotidienne de Daniel Mermet. "On va fortement revoir nos après-midis qui ont perdu beaucoup trop d'audience ces deux dernières saisons... L'intégralité du 15h/19h va être réinventé", nous a-t-elle expliqué avant de confirmer l'arrêt de cette émission à l'antenne depuis 25 ans.
"J'ai longuement discuté en début de semaine avec Daniel, qui un très grand professionnel de la radio. C'est une décision difficile car "Là-bas si j'y suis" est présente dans la grille depuis 1989 ! En vingt-cinq ans, "Là-bas si j'y suis" nous fait vivre des moments forts, mais l'émission a perdu 100.000 auditeurs en deux ans donc on va l'arrêter... J'ai fait des propositions à Daniel Mermet. J'espère qu'il va rester parmi nous !", a ajouté Laurence Bloch.
"C'est une décision politique"
Une décision qui a "consterné" l'intéressé. Il ne s'est pas gêné pour exprimer son amertume dans une interview au Monde. "Les raisons avancées pour cette suppression sont fallacieuses. Laurence Bloch avance que l'audience a régulièrement baissé depuis des années. Or, lorsqu'en 2006, nous sommes passés de 17 heures à 15 heures, nous sommes descendus à 150 000 auditeurs. Selon les derniers sondages, nous en sommes à 450 000 auditeurs", explique le journaliste de 71 ans. Il assure avoir proposé que son équipe reprenne "Là-bas si j'y suis" sans lui. "Il existe une équipe de cinq jeunes journalistes de 30 ans qui travaillent avec moi depuis des années et qu'il faut recycler. J'ai donc proposé qu'ils reprennent la tranche de l'émission et que je m'efface petit à petit pour qu'ils s'approprient de la ligne éditoriale", ajoute-il.
"Je crois surtout que c'est une décision politique. Je ne suis pas propriétaire de l'antenne mais je pense que derrière cet arrêt, il y a de la revanche, probablement des règlements de compte. De nombreux directeurs ont tenté de nous débarquer, mais ils n'y sont jamais arrivés. (...) Jean-Luc Hees nous a laissés tranquilles, même s'il n'était pas d'accord avec tout ce que l'on faisait. Et Hees n'a jamais été un gauchiste ! Seulement c'était un excellent journaliste qui avait fait ses classes aux Etats-Unis et estimait qu'il fallait laisser tout le monde s'exprimer. (...) Aujourd'hui, les dirigeants de Radio France ne sont plus des journalistes mais des gestionnaires.", observe Daniel Mermet qui avait fortement mobilisé ses "auditeurs modestes et géniaux" lorsque, en 2006, la direction avait décidé de décaler son émission à 15h (contre 17h auparavant).
Jean-Luc Mélenchon en renfort
"Là-bas si j'y suis" est une émission qui se caractérise par des reportages sur des sujets rarement abordés dans l'audiovisuel. Daniel Mermet a, par exemple, longuement donné la parole aux ouvriers de Florange pour qu'ils racontent comment ils vivaient la fermeture des hauts fourneaux. Cette émission volontairement militante plaît beaucoup aux électeurs d'extrême gauche.
Hier soir, Jean-Luc Mélenchon, le leader du Font de gauche, a apporté son soutien à Daniel Mermet. "L'arrêt de l'émission de Daniel Mermet (...) est un rude coup porté au pluralisme sur le service public audiovisuel. Les démocrates et les têtes dures doivent résister et protester pour que l'émission soit maintenue. Un a un, tous les espaces de pensée non conforme sont refermés.... Emission après émission, les sociaux-libéraux et les libéraux occupent tout le temps d'antenne, volent les mots, tordent la pensée, bourrent les crânes. Le moment venu, quel ample coup de balai il faudra !", a écrit l'homme politique sur son blog.