L'œuvre de [film%]Spike Jonze[/film%] est un beau film en monochrome, étrange et fascinant, tiré d'un grand classique de la littérature enfantine américaine du même nom, un album illustré sorti en 1963, déjà adapté en 1988 en dessin animé et en version ballet aux États-Unis en 1997. Le réalisateur excentrique, à qui l'on doit les inimitables Adaptation et Dans la peau de John Malkovich, a suivi la tradition du film « cadeau de Noël », mais l'a transformée et même pervertie à sa manière.
Bizarrement, il nous offre pour Noël un film triste. La différence avec les autres animations pour enfants apparaît évidente, surtout parce qu'il a fait un usage intelligent d'une combinaison gagnante : prises de vue réelles, marionnettes impressionnantes comme dans un ballet, et animation numérique avec des effets spéciaux surprenants qui permettent de reporter l'expression faciale des interprètes sur leur avatar maximonstre.
Parti sur un scénario très classique du type « jeune garçon malheureux avec sa famille, qui cherche un autre monde où il aura de vrais amis » (comme dans le classique L'histoire sans fin et le récent Coraline, notamment), il bifurque vers un monde que l'on n'a jamais vu et qui finalement impressionne plus que les aventures, même très colorées et avec l'utilisation ingénieuse de la technologie du film de Besson, Arthur et la vengeance de Maltazard.
Une histoire trop effrayante pour les enfants
Cette fois, on n'a pas cherché à faire un spectacle visuel joyeux et brillant : le monde que Max trouve chez les maximonstres fait tout d'abord un peu peur. Tout semble froid et différent de ce que l'on pouvait imaginer : les monstres sont des monstres gentils, mais qu'il faut d'abord apprivoiser car ils menacent d'abord de tuer, comme l'Ikran, la créature volante dans Avatar.
Le mélange intéressant de l'être humain avec les maximonstres, des créatures de théâtre pour enfants, attire l'attention. Dans cette fascination, il y a aussi beaucoup de tristesse car Max se sent seul et mal-aimé, entraînant la sympathie. On n'a pas essayé de cacher ce côté triste en rendant la réalité plus jolie : on l'a au contraire bien exploité. C'est la différence de ce film : tout a l'air vrai et sans tricherie, les tons monochromes en beige et brun accentuent cette impression de tristesse et de naturel.
A voir en famille - avec précaution
Même si le film de Jonze n'est pas d'un humour renversant, il réussit tout de même à faire sourire par des moments étonnants et tendres. Il traite de l'enfance un peu monstrueuse et rejetée avec profondeur en montrant le côté noir, façon Les 400 coups. Le réalisateur de 40 ans a le mérite de s'être mis au niveau de l'enfant pour explorer son âme. En revanche, il s'agit d'une sorte de poésie un peu cruelle, pas forcément à voir à Noël, et qui pourrait effrayer certains enfants. Sauf si des adultes sont là pour les rassurer, leurs maximonstres à eux.