L'arrêt de "Jusqu'ici tout va bien" était acté depuis plusieurs semaines dans la tête des dirigeants de France Télévisions. Il est officiel depuis le 6 décembre, hier soir Sophia Aram a présenté sa dernière. Face à des audiences catastrophiques depuis son lancement le 16 septembre, les patrons du service public se sont résignés à mettre "Jusqu'ici tout va bien" à la poubelle. Le programme, qui a pollué la rentrée de France Télévisions, a fait une victime à France 2, Philippe Vilamitjana, remplacé par Thierry Thuillier depuis peu. Retour sur les raisons d'un échec (et d'un gâchis) annoncé.
1. Un programme mal né
Combien d'animatrices ont été annoncées à la tête de cette émission avant qu'elle ne soit mise à l'antenne ? Une bonne dizaine avant l'été. Toutes ont refusé de se lancer dans cette aventure à hauts risques. Et pour cause, le tunnel de l'access prime time est ultra-concurrentiel. Avant même sa diffusion, ce projet a donc beaucoup amusé les journalistes, qui se sont gaussés sur les refus des uns et des autres à incarner le programme. Avant que Philippe Vilamitjana, directeur des programmes de l'époque, ne sorte de son chapeau le nom de Sophia Aram...
2. Une animatrice inconnue du grand public
C'est un immense coup de poker qu'a tenté France 2 en donnant les clés de son stratégique access prime time à une quasi-inconnue. Son nom n'était pas étranger des auditeurs de France Inter, qui l'ont entendue dans la matinale de Patrick Cohen pendant deux saisons. Mais comme le rappelle assez justement Laurent Ruquier, "France Inter n'est pas la France". Sophia Aram fût donc une illustre inconnue pour la plupart des téléspectateurs présents devant leur poste à cette heure. Humoriste et chroniqueuse, Sophia Aram n'a par ailleurs jamais été animatrice de télévision, un vrai métier. Quelle idée de la jeter dans le grand bain de la quotidienne, chaque jour en direct ?
3. Une première catastrophique
Comment France 2 a-t-elle pu mettre à l'antenne le premier numéro de "Jusqu'ici tout va bien" ? Sur les réseaux sociaux, la très attendue première émission de Sophia Aram a été descendue en flèche par la plupart des observateurs. Le bad buzz était définitivement enclenché. "Nous n'étions pas prêts", reconnaît-on aujourd'hui à France Télévisions. Pourtant, le signal d'alarme avait été déclenché quelques jours plus tôt. Une semaine avant la première, les pilotes tournés étaient "catastrophiques", de l'aveu même de ceux qui y ont assisté. La chaîne assure qu'ils n'étaient pas conformes au concept original, même si Sophia Aram affirme le contraire.
4. Un "non concept" traîné comme un boulet
Un concept, quel concept ? Sophia Aram croyait sans doute faire un bon mot en annonçant à la presse que son émission n'en n'avait pas. Mais elle traînera cette déclaration comme un boulet pendant plusieurs semaines. Beaucoup d'émissions n'ont pas de concept ou s'inspirent de celui d'en face. De là à le crier sur tous les toits... La guerre de l'access est telle que la concurrence s'est délectée de ce plantage monumental. Mais quand le Aram bashing est devenu nauséabond sur les réseaux sociaux, ce sont tous les animateurs du PAF qui ont volé à son secours. Il faut dire que l'animatrice a encaissé des tombereaux de critiques et d'insultes sans broncher pendant plusieurs semaines. Saluons son courage d'avoir tenu bon.
5. Tout tenter au risque de tout brouiller
On ne peut pas reprocher à l'émission de s'être enfermée dans un statu quo fatal. Jour après jour, la production a tenté de s'adapter et d'améliorer le contenu de son programme. Mais après de multiples changements de décors, de chroniqueurs, de rédacteur en chef, l'impact sur les audiences a été nul. L'embauche de nouveaux chroniqueurs chaque jour est devenu un running gag et a achevé de brouiller l'identité du programme.
6. N'est pas producteur de quotidienne qui veut
Morgane est un producteur connu et reconnu par les professionnels de la télévision. Mais jamais cette société n'avait produit une quotidienne. Livrer cinq directs par semaine n'est pas à la portée de tous les producteurs. France Télévisions a démultiplié les risques en faisant appel à un prestataire dont l'émission d'accueil n'est pas la spécialité.