Musique
Soprano : "J'ai toujours été engagé sans trop m'engager"
Publié le 8 octobre 2010 à 13:39
Par puremedias
À l'occasion de la sortie de son nouvel album "La Colombe", Soprano a accepté de répondre à nos questions. Politique, musique et football en passant par crise du disque, le rappeur revient sur des thèmes qui lui tiennent à coeur.
Le rappeur Soprano Le rappeur Soprano© EMI
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Si c'est aux côtés de Psy 4 de la Rime qu'il fait ses premiers pas, Soprano mène également une carrière solo depuis trois ans. Après son premier album "Puisqu'il faut vivre", le rappeur marseillais revient avec "La Colombe", un album aux textes francs et justes, aux sons parfois plus pop mais qui conserve cette touche rap. C'est donc à l'occasion de la sortie de ce nouvel album que Soprano a accepté de répondre à nos questions sur ses chansons, son partenariat avec l'Olympique de Marseille mais aussi sur la crise du disque.



Tu reviens avec "La Colombe", un deuxième album solo avec des featuring, des sons parfois plus pop et une chanson acoustique. Pourquoi cette envie d'aller vers d'autres styles ?
Le truc c'est que j'ai sorti cinq albums, que ce soit en groupe en solo, je mélange tout ça. J'ai eu besoin de développer d'autres trucs avec mon style. Après, c'est vrai que moi, j'ai toujours essayé des nouvelles choses. Depuis le premier album avec mon groupe Psy 4 de la Rime, c'est vrai que j'ai toujours tenté des trucs comme "Le Monde est Stone, Stone". On fait un refrain un peu chanté, un peu plus pop. J'aime bien mélanger les styles, vu que moi j'écoute beaucoup de musique, je n'écoute pas que du rap, j'écoute peut-être même 40% de rap et le reste de tous styles de musiques, et je voulais vraiment que cela se ressente dans mes disques.

Je sais que les artistes n'aiment pas trop avoir d'étiquettes, mais dans quelle catégorie peut-on ranger ce nouvel album ?
Rap, parce que quand même c'est du rap. Mais aussi parce que je veux que les gens viennent dans ce rayon pour découvrir d'autres artistes. Donc je veux que les gens viennent en se disant "Ah, j'aime bien Soprano, j'ai entendu un morceau qui est super ouvert". Je me rappelle une fois qu'on m'avait dit "Je n'aime pas le rap, je n'écoute pas le rap mais j'adore ta chanson "À la bien". Depuis que j'ai écouté ton morceau "À la bien", je suis parti te suivre en interview, j'ai écouté ce que tu disais en interview et tu parlais beaucoup de Keny Arkana et j'ai acheté son disque et maintenant j'adore". Ce sont des petits trucs comme ça que j'aime beaucoup, faire découvrir l'univers de ma musique, parce que je pense que si les gens aiment les mots, aiment l'émotion, ils peuvent aimer le rap. Nous, on aime d'autres trucs donc pourquoi les gens ne pourraient pas aimer le rap ? Après, il y a du bon et du mauvais partout, comme dans le rock, le reggae...



Dans la majorité de tes chansons, tu parles des problèmes du monde, de l'actualité, de l'environnement... Tu te sens concerné par la politique actuelle ?
La politique toujours, l'environnement, ça fait un petit moment mais c' est vrai que Haïti m'a mis une grosse claque. J'ai toujours été engagé sans trop m'engager. Ça veut dire que je ne suis pas là à prôner un parti, mais c'est vrai que j'ai toujours été engagé politiquement à travers mes morceaux. La politique, j'essaye de ne pas trop la mettre en avant mais je donne mon avis sur certains trucs parce qu'à l'heure actuelle, je ne vois personne qui puisse vraiment nous représenter, donc je ne peux pas trop dire "Ouais, lui il est bien parce que...". Je ne connais même pas les programmes de telle ou telle personne, donc voilà un peu mon engagement politique. Il est plus musical que diplomatiquement politique, on va dire ça comme ça.

En écoutant tes chansons, on comprend que l'actualité t'inspire, de quoi te sers-tu d'autres pour les écrire ?
La vie de ceux qui me sont très proches. Par exemple un morceau comme "Château de sable" qui parle du divorce, 70% de mes amis qui se sont mariés, ont divorcé. Des gens de mon âge. Je regardais les statistiques et je voyais qu'il y avait 1 couple sur 2 qui divorçait, ça m'avait choqué. Parce que je me rappelle que quand j'étais à l'école, on disait que le noyau de la société, c'était la famille et si le noyau n'est pas bien, la société ne peut pas être bien. Je ne dis pas qu'il faut rester en couple quand on ne s'entend plus avec une personne mais ce que je dis c'est qu'aujourd'hui, c'est vrai qu'il y a des couples qui ne divorcent pas parce qu'ils ne s'aiment pas, c'est pour ça que je le dis dans le morceau : "La vie de couple ne se résume pas qu'à I love you", mais c'est par rapport à tout ce qui s'en suit dans la société, par rapport à la vie qui est difficile. Ça, je me suis inspiré d'un de mes amis par exemple.

Et outre le divorce... ?
Sinon, par exemple, il y a un morceau que j'avais écrit il y a longtemps, qui s'appelle "Comme une bouteille à la mer", et ce morceau-là, je m'étais inspiré d'un morceau de Daniel Balavoine, c'était "Tous les cris les SOS". J'étais dans ma voiture un soir, j'écoutais cette chanson, je prenais chaque phrase d'une manière violente dans ma tête, et tout d'un coup le texte est sorti. Ça dépend des situations et aussi des émotions. Par exemple "Sur la Lune", ce qui m'a inspiré, c'était un collègue à moi à qui je disais, "mais tu fumes trop, ce shit il va te tuer", et il me disait : "C'est le seul moyen que j'ai pour voir le monde d'un peu plus petit". Dès qu'il m'a dit cette phrase "Sur la Lune" est sorti. Ça dépend des situations et des frissons qui me viennent à des moments précis de ma vie.



Aujourd'hui avec la crise du disque, on sait que de nombreux artistes ont du mal à vivre de leur passion. Selon toi, quelles solutions existe-t-il
Il y a Internet, quand même. Il y a des artistes qu'on ne connaît même pas, qui font des concerts pleins, qui doivent peut-être pas vendre beaucoup de disques mais qui ont une popularité magnifique grâce à Internet. C'est malheureux, mais avec le téléchargement et tout ça, quand tu es indépendant c'est toi qui souffre le plus de ça, tu vis de ça ! Les gens ne font pas gaffe, tu sacrifies des jours de studio, tu mets de l'argent dedans, tu ne vois pas ta famille, tu sors le disque et tu en vends trois ! Pourtant tout le monde aime ce que tu fais. Tu marches dans la rue "Ouais, j'ai ton disque, j'ai ton disque"... et toi tu es là "Mais merde, va falloir que je fasse moins de musique parce qu'il faut bien que je paie les couches". Et tout d'un coup, tu ne fais plus ce que tu aimes, le public n'entend plus ce que tu fais, il croit que tu as arrêté. Mais non, c'est simplement parce qu'ils n'ont pas acheté de disques, tu es retourné à la réalité de la vie qui fait qu'il faut avoir de l'argent. C'est devenu très très difficile, et je dis même que d'ici l'année prochaine, je crois que le disque n'existera plus et les gens ne font pas gaffe.

Dans une de tes chansons tu parles de Hiro Nakamura de Heroes, ta chanson est d'ailleurs intitulée "Hiro". Est-ce un hommage à une série que tu aimes ?
J'adore la première saison, après ils ont fait n'importe quoi. Mais j'aime bien le personnage de Hiro Nakamura, il me fait délirer. Il y a un autre morceau que j'ai fait, je ne l'ai pas mis dans l'album et qui s'apelle "Sylar" mais c'est plus un côté rap, technique, un peu flow. J'aime beaucoup l'idée que Hiro puisse voyager dans le temps en clignant des yeux et aller changer des trucs. Et je me suis dit, plus on grandit, plus on court derrière le passé. Et si j'avais ce pouvoir, il y aurait plein de choses que j'aurais aimé changer, vivre, voir de mes propres yeux, comme quand je dis "J'aurais été voir la Mer Rouge s'écarter devant Moïse", ça c'est un truc de fou, j'aurais aimé être là, voir la mer s'ouvrir... C'est vrai que le thème, quand il m'est arrivé, je me suis dit que ça pouvait parler à beaucoup de monde, revivre certains trucs du passé.



Dans ton clip "Crazy", tu parles de la génération facebook, SMS, Twitter, Internet, iPhone..., toi aussi tu fais partie de cette génération, tout le temps le portable à la main ?
Eh oui, regarde ! Je l'ai enfermé là [ndlr : dans sa poche] pour justement être bien concentré, parce que sinon avec l'iPhone, tu es toutes les trois secondes comme ça en train de regarder si tu as eu un mail. Après je suis moins Facebook, parce que avec mon statut "Soprano", c'est un peu compliqué d'être sur Facebook. Après Twitter, j'aime bien. On est vraiment une génération bousillée. Pourquoi je dis : "Blackberry ou iPhone", parce qu'il y a des gens qui sont à fond Blackberry et d'autres qui sont à fond iPhone et à chaque fois c'est la guerre. Finalement, on est comme des drogués... On est fou, on est "crazy". Avec ça on devient plus fou, et on se pose d'autres problèmes. Alors qu'on ne devrait pas penser à ça, on devrait se construire un avenir, s'amuser, nous on s'amuse pour oublier, alors que normalement on s'amuse pour délirer. Donc c'est un peu dommage.

En parlant de ce clip, tu utilises un graphisme proche du clip de Kanye West, "Good Life" et des créations de SO-ME, le directeur artistique de Ed Banger, c'est un artiste que tu aimes ?
Oui, moi j'aime beaucoup Kanye West. J'aime beaucoup depuis très longtemps. Ce que j'aime bien chez Kanye West, c'est qu'il tente des trucs, il essaye de faire avancer la musique. La dernière fois, il a dit une phrase que j'aime beaucoup. Il a dit : "Dans le rap, aux États-Unis, les noirs font tout pour être 2Pac, moi j'essaye d'être Jimi Hendrix". Je sais que c'est orgueilleux ce qu'il dit, mais le fond de cette phrase est bien. Il essaye de ne pas avoir de limite, d'amener la musique encore plus loin. Après je n'aime pas tout. Des fois, il y a des morceaux qui sont moins bien ou sinon des actions comme il avait fait aux MTV Awards avec la chanteuse de country, c'est pas trop classe ! Mais c'est vrai que j'aime bien son côté artistique à essayer de ramener quelque chose de nouveau, ou inventer quelque chose de super.

Avec quel rappeur ou chanteur rêverais-tu de faire un featuring ?
Mon rappeur préféré moi, c'est Eminem parce que je traduis ses textes, ils sont supers. Il est toujours là depuis des années, j'aime bien. Après, il est un peu fou. Il parle mal de sa mère mais pour le reste, il est super fort. Sinon, je voulais faire des morceaux avec Tiken Jah Fakoly, j'ai fait, Amadou et Mariam, j'ai fait.

Tu as une liste sur ton frigo non ?
Je te jure, je vais la faire ! Parce que franchement, il y a beaucoup de gens que j'aime bien, même hors rap, par exemple, j'aimerais bien que Zazie me fasse un refrain au piano par exemple. Je suis aussi un gros fan de Daniel Balavoine mais bon, il n'est plus sur Terre aujourd'hui, donc malheureusement je ne pense pas qu'on va faire ça. Il y a beaucoup d'artistes. Là par exemple, je suis à fond sur le dernier album de Muse. Tu imagines, Muse ils sont derrière toi, tu lâches un couplet comme Jay-Z fait avec Coldplay. Moi j'aime beaucoup les trucs comme ça. Après, il y a des trucs reggae, j'aime beaucoup Gentleman, c'est un chanteur de reggae en Allemagne, tu vois, ça part dans tous les sens avec moi. will.i.am, il est super fort ! Il fait des trucs, à chaque fois, il me surprend. Il arrive à réunir tout le monde sur des morceaux.



Tu vas être partenaire de l'OM...
Eh oui ! Mon équipe !

Tu as acheté tes crampons ?
Oui, je te jure en plus c'est vrai. Je me suis dit à un moment donné, il y a des gens qui vont vouloir me tester au ballon, vu que je suis ambassadeur. Je me suis pris des petits crampons et maintenant, j'attends n'importe qui sur le terrain, sur la pelouse.

Tu peux nous expliquer en quoi va consister ce partenariat ?
C'est une collaboration que j'ai indirectement toujours faite, dans mes clips par exemple dans "Halla Halla", où je vais voir Pape Diouf et il me donne les clés du Vélodrome, ou même sur scène, je me rappelle, je coupais la salle en deux, j'appelais la moitié de la salle Drogba et l'autre Zizou, parce que l'un c'est un marseillais et l'autre c'est l'OM. C'est vrai que ça a toujours été quelque chose que j'ai prôné. Après là, c'est juste que c'est officiel, ça veut dire que quand je parle, les gens de l'OM, m'ont dit "C'est bon, on t'autorise" (rires). Avant ils le savaient pas, donc c'est surtout pour pouvoir représenter bien ma ville et c'est un rêve de gamin. Je fais partie de l'OM, bon je ne suis pas payé, mais le fait d'être ambassadeur, je suis payé, ça veut dire qu'à chaque fois qu'on me pose la question sur ça, je suis content. Je peux parler de mon équipe, ça me sort un peu de la musique, c'est mon autre passion. Après le rap, c'est l'OM. Ça veut dire que même ma fille, la chanson qu'elle chante c'est "Désolé" de Sexion d'Assaut et après c'est "Allez l'OM", les chants de supporters.

Bon, on m'a demandé de te poser la question fatidique : Marseille champion en 2011 ?
Mais bien sûr, sans aucun doute. Les gens, ils sont là : "Ouais l'OM, début de saison moyen !", mais non les gars, tranquille. On a le meilleur mercato, la meilleure équipe. Pour l'OM, la saison, elle commence en janvier ! En janvier, les gens vont voir ce que c'est l'OM !

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