

Dans son "portrait de la semaine" sur "Sept à huit", Audrey Crespo-Mara a l'habitude de faire parler ses invités. De Jean-Claude Van Damme à Bernard Tapie, en passant par Fabrice Luchini, tous ont été confrontés à la pugnacité de l'intervieweuse qui a comme objectif de les "faire sortir de leur personnage" et de révéler l'homme ou la femme en face d'elle. Dans un entretien accordé à "TV Mag", la journaliste de TF1 s'est exprimée sur ce format qu'elle présente depuis 2020 et qui lui assure une liberté de parole totale. "C'est quelque chose qui me tient à cœur", assure celle dont l'entretien avec Gabriel Attal a failli tourner court. Elle s'est en effet expliquée sur le témoignage de l'ancien premier Ministre autour du harcèlement scolaire, subi dans sa jeunesse. Mais leur discussion ne s'est pas déroulée comme elle l'espérait : "J’ai passé plus d’une heure au ministère à essayer de comprendre ce qu’il avait vécu réellement, mais il n’était pas prêt. Il était déchiré entre l’envie d’en témoigner pour faire avancer la cause qui lui tenait à cœur et la crainte de se victimiser et de se mettre trop en avant."
Les craintes d'Audrey Crespo-Mara se sont confirmées "le jour du tournage", lors duquel le dirigeant politique "était dans sa posture de ministre". Ce qui l'a contrainte à couper la caméra. "J’ai arrêté très vite l’interview, lui disant que ça n’allait pas le faire. C’était compliqué pour lui, c’était la première fois qu’il témoignait en tant qu’enfant, puis adolescent, et pas comme un homme politique. Il s’est ouvert et il a décidé de témoigner, mais je ne l’aurais pas lâché. Il était hors de question qu’on ait un discours politique. Ce n’est pas l’émission", analyse-t-elle avec du recul. Ce jour-là, Gabriel Attal était parvenu à sortir de son rôle d'homme public pour évoquer l'acharnement d'un camarade de classe à son encontre à la fin du collège. "Il postait des photos de mes amis puis allait mettre des commentaires en usurpant mon identité pour les insulter. Son objectif, c'était de m'isoler. Parfois j'arrivais le matin à l'école et mes amis ne voulaient plus me parler", s'était souvenu le ministre de l'Éducation de l'époque. "Ce qui était dur pour moi, et qui l'est aujourd'hui pour beaucoup de jeunes, c'est le sentiment qu'on a personne à qui en parler", avait-il ajouté.
La joker des JT du week-end est réticente à l'idée d'interroger des politiques dans son rendez-vous du dimanche soir. "Ils ont suffisamment d’espace pour parler de leur programme, de leurs idées. J’ai fait pendant des années des interviews politiques à LCI et à Europe 1. Ce n’est pas l’exercice que je préfère parce que la plupart du temps, ils viennent avec leurs éléments de langage, il ne se passe pas grand-chose, c’est plus stérile comme exercice", affirme celle qui souhaite tendre vers le documentaire ou le talk-show mais attend des propositions. Mais l'art du portrait continue de la satisfaire, d'autant que certains d'entre eux restent gravés dans son esprit. "J’ai rêvé de Charles Biétry plusieurs nuits entre nos deux rencontres et même après le tournage. Il n’y a pas une journée qui passe sans que je pense à lui", assure-t-elle, également bouleversée par son échange avec Stéphane Voirin, le compagnon d’Agnès Lassalle, professeure d'espagnole poignardée par un élève dans un lycée de Saint-Jean-de-Luz. "Ce sont des moments de vie qui vont bien au-delà d’un job. Leur témoignage ramène au vrai sens des choses", confie la journaliste.