40° à l'ombre. Sur le plateau de France 2 qui surplombe la place du Trocadéro, Jean-Baptiste Marteau est contemplatif. "J'ai grandi à Paris, j'ai l'impression de redécouvrir ma ville", s'enthousiasme-t-il depuis le toit du musée de l'Homme à Paris. "Je ressens un peu la même sensation que lorsque je me suis retrouvé en haut de la célèbre poutre de 'Fort Boyard'. C'est vertigineux". Et plus animé ! "Il y a la ferveur du stade des champions et les hurlements qui remontent du terrain de beach-volley du champ de Mars. C'est unique !".
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"J'ai l'impression de ne pas vivre chez moi depuis une semaine"
Pour décrire l'ambiance sonore, le matinalier de Franceinfo est une source on ne peut plus fiable. Le journaliste vient en effet d'achever ici sa sixième heure d'antenne d'affilée. "Et j'ai rendu l'antenne hier (mardi 30 juillet, ndlr) à 23h. J'ai l'impression de ne pas vivre chez moi depuis une semaine. Je rentre, je pose mes affaires, je me douche et je repars. Ça fait partie des Jeux", ne se lasse pas celui qui commente également les épreuves d'équitation avec Virginie Coupérie-Eiffel à Versailles.
"C'est le shift le plus long de la journée", glisse Pierre Martin, directeur de production au service des sports de France Télévisions, à l'oreille de puremedias.com qui assiste sous un soleil de plomb ce mercredi 31 juillet 2024 peu avant 15h – le plateau installé sur un échafaudage est ouvert de 4h30 à 1h – au passage de relais avec Cédric Beaudou. "Je suis content de voir la relève arriver", lâche, tout sourire, Jean-Baptiste Marteau à son collègue des sports, un tantinet inquiet des fortes températures du jour. "Comment ne pas transpirer par 40 degrés ! Il y a un ventilo ?".
"Il fait très chaud, on a le soleil qui tape dans le dos le matin, en face le soir. Il y a du vent, les feuilles s'envolent (Anne-Sophie Lapix a d'ailleurs perdu les siennes en pleine interview au "20 Heures" ce jeudi 1er août, ndlr)", ajoute Jean-Baptiste Marteau, qui travaille pour la première fois de sa carrière main dans la main avec le service des sports de France Télévisions.
"On va te mettre une noisette en BMX"
"Laurent Luyat, Cécile Grès et Cédric Beaudou m'ont filé des tuyaux", se montre-t-il reconnaissant. "Si je maîtrise l'exercice de la bascule (sur Franceinfo, Jean-Baptiste Marteau doit rendre l'antenne de sa matinale chaque matin à 8h33, ndlr), j'ai découvert un nouveau jargon. Quand dans l'oreillette, j'ai entendu 'On va te mettre une noisette en BMX' (lancer une interview enregistrée dans les moments de creux, ndlr), j'ai dû faire répéter la régie".
Rodé à l'exercice, Cédric Beaudou est effectivement à son aise. Minutieux, le journaliste estampillé rugby prépare ses fiches classées par horaires de passage et disciplines depuis des semaines. "Canoë-kayak, boxe, équitation, cyclisme sur piste, ça c'est bon je connais", énumère-t-il, reconnaissant ses lacunes en voile. "Heureusement que Gaël Robic est là...", admet-il. "Ici, c'est un tourbillon, ça s'enchaîne. Mais dès que j'en ai l'occasion, j'aime raconter des histoires d'athlètes et donner des repères dans chaque discipline aux téléspectateurs, ce que les commentateurs, contraints d'aller à l'essentiel, n'ont pas toujours le temps de faire".
Le conducteur de la tranche n'est lui non plus jamais très loin. "La veille", poursuit Cédric Beaudou, 'je liste sur cette fiche tous les événements de ma tranche qui s'enchaînent minute par minute en sachant que tout peut évoluer en fonction des qualifiés", précise-t-il avant de s'interrompre un instant. "Là, je viens d'apprendre (par le chef d'édition, ndlr) que le match de tennis de table d'Alexis Lebrun sera diffusé sur France 3 donc je ne pourrai pas le vendre en disant 'restez avec nous' puisque ce sera sur France 3."
"Le badminton, ça ne vous intéresse pas ?"
La décision qui vient de remonter aux oreilles de Cédric Beaudou a été tranchée à quelques kilomètres de là, au siège de France Télévisions. C'est depuis une petite cabine qui ne paye pas de mine que Fabrice Collin, rédacteur en chef de France Télévisions sport, et Martial Fernandez, rédacteur en chef adjoint, arbitrent en effet la programmation éditoriale. Autrement dit, ils décident laquelle des trois chaînes à leur disposition, France 2, France 3 ou la chaîne numérique Paris 2024, accueillera telle ou telle discipline. "Le match de tennis de table (évoqué par Cédric Beaudou, ndlr), cela fait quinze jours qu'on voulait le passer sur France 2. On l'a finalement diffusé sur France 3 parce que ça tapait dans trop de choses", explique Martial Fernandez.
Les deux hommes ajoutent qu'ils éditent chaque jour le programme du lendemain qui est ensuite amendé en temps réel quand la voix grave d'un chef d'édition les interrompt. "J'ai fait le choix d'enregistrer la boxe parce que sinon on aurait commencé à diffuser la boxe avec le risque de devoir la couper pour aller au combat de judo", a-t-on pu entendre. Fabrice Collin est alors subitement pris d'un doute. "J'y serai allé quand même (à la boxe)", répond-t-il, aussitôt rassuré par son adjoint. Le rédacteur en chef de s'inquiéter à nouveau : "Et le badminton, il est où ?", fait-il remarquer. "Ça n'intéresse personne ? Ils sont sur quoi sur la Trois après ?", questionne-t-il Martial Fernandez. "La Trois, ils font un peu de voile pour aller jusqu'au beach-volley", lui répond-t-il. Pas satisfait, Fabrice Collin contacte La Villette, où Claire Vocquier-Ficot officie au même moment sur France 3.
"Derrière, là, vous partez sur de la voile ?", demande-t-il. Le programme a encore évolué. "Non non, on va partir sur du beach-volley, on fait trois minutes de résumé du match de Félix Lebrun avec une interview du Français...", entend-on en retour. "Le badminton, ca vous intéresse pas ?", insiste Fabrice Collin. Sans succès. "On va partir au beach-volley à 16h55, on n'aura pas le temps". "Ok", se résout le rédacteur en chef de France Télévisions sport, rappelant tout de même qu'en "ce moment, il y a Toma Junior Popov qui est en train de jouer" (le Français a finalement été éliminé en huitième de finale du tournoi olympique à L'Arena porte de La Chapelle, ndlr).
"Une petite pièce qui sert de passe-plat entre la Deux et la Trois"
Le sort du badminton sera tranché en notre absence. Le temps nous est malheureusement compté. Celui d'Anne-Sophie Lapix aussi. La présentatrice du "20 Heures" de France 2 file avec sa rédactrice en chef de France Télévisions pour rejoindre le Trocadéro.
"Le '13 Heures' et le '20 Heures' sont les moments de la journée les plus intenses autour du plateau en extérieur", reconnait Pierre Martin, le directeur de production au service des sports de France Télévisions. "Dans ces créneaux-là, on assure l'antenne en plateau et en même temps, on fait la continuité sport dans une petite pièce qui sert de passe-plat entre la Deux et la Trois. C'est un pic du point de vue de l'intensité et des personnes avec la présence en plateau de nos athlètes."
Jusqu'ici, la retransmission des Jeux olympiques s'est opérée quasiment sans dommage malgré le violent orage qui a éclaté à Paris derrière Cédric Beaudou en fin de soirée ce jeudi 1er août. Seule ombre au tableau, reconnaissent de concert Frédéric Gaillard, directeur de production, et Stéphane Grudet, ingénieur support à France Télévisions, le "déclenchement trop tardif du mode secours après un bug technique pendant le combat de la judoka Clarisse Agbegnenou". "Pendant quelques secondes, nos commentateurs Rodolphe Gaudin et Émilie Andéol ont fait de la radio".