Cet ersatz de comédie est aussi lourd que son jeune héros peroxydé. La nullité de "L'élève Ducobu" en fait un film exclusivement réservé aux moins de 5 ans et aux personnes en état végétatif.
Si le spectateur touchait un centime à chaque fois qu'est prononcé le nom Ducobu dans le film, il serait millionnaire à la fin de la séance. « Ducobu, au piquet ! », « Ducobu, vous avez triché ! », « Ducobu, arrêtez ! ». Oui, s’il vous plaît. Préparez-vous, donc, à entendre Ducobu jusqu’à plus soif dans ce film qui ne mérite pas un bonnet d’âne mais un envoi direct en maison de correction.
Un spectateur puni
L’adaptation de la BD est fidèle à l’univers des deux Belges Godi et Zitrou et c’est peut-être ce qui compte, après tout. Ducobu, roi des cancres et fortiche de la triche, multiplie les combines pour copier sur sa voisine, Léonie Gratin, Miss 10 sur 10, mais c’est moins lui que le pauvre spectateur qui est puni. Car on lui assène coups sur coups : des enfants qui jouent mal, des dialogues puérils et des rebondissements qui n’en sont pas. Le film, comme la gentille petite Léonie, sosie crispant de Fifi Brindacier, est bel et bien gratiné.
C’est bien dommage car il empêche Elie Semoun et Joséphine de Meaux, qui peuvent pourtant tous deux être hilarants, de briller. Le premier, dont le génie comique n’est plus à démontrer, se contente de singer Elie Kakou. Mais ce Elie-là pédale dans la semoune. Une brève accalmie cependant dans ce ciel bas et lourd qu’est L'élève Ducobu : la visite de Monsieur Latouche, interprété par l’humoriste des Petites Annonces, à la MREN, la Maison de Repos de l'Education Nationale. Ce clin d'œil à la MGEN, l’inefficace mutuelle des enseignants, est plutôt cocasse. On y découvre un asile de professeurs que leur travail a rendu fous : des profousseurs, en quelque sorte. Sous la pluie, cet hôpital psychiatrique spécialisé dans les pédagogues givrés serait presque poétique. Mais L'élève Ducobu rate sans cesse la marche et se vautre dans l'immaturité.
Un film horriblement suranné
Le réalisateur ne s'en défend pas : ni second degré ni double-sens dans ce film qui prône la simplicité. Mais cette légèreté assumée se transforme bien vite en terrible superficialité. Car le cœur du film, l'échec scolaire, est loin d'être une plaisanterie. Avoir zéro n’a jamais fait rire personne. « Si l'on guérit de la cancrerie, on ne cicatrise jamais tout à fait des blessures qu'elle nous infligea » écrit très justement Daniel Pennac. L'origine de « cancre » est d'ailleurs la même que celle du mot cancer. Cette noirceur n'est pas une seule seconde effleurée par le film qui ne fait de son antihéros lourdaud qu'un gros rigolo. De plus, Mademoiselle Rateau, interprétée par Joséphine de Meaux, est un professeur de musique chahuté et, sans espérer une profondeur digne du grandiose La Journée de la jupe, on aurait aimé voir poindre, au-delà des pitreries et autres singeries, un soupçon d’esprit. Car l’enseignant enseigne parfois en saignant et ce n’est pas forcément hilarant.
Autre problème : si l'on est né avant 1992, on risque de voir dans L'élève Ducobu une terrible apologie de la tricherie. Le film ne pouvait pas plus mal tomber à l'heure où les révélations de fuites au bac se multiplient. En réalité, Philippe de Chauveron, qui était le scénariste du non moins caricatural mais sympathique Neuilly sa mère !, a réalisé un film horriblement suranné. La menace du bonnet d'âne et la torture de la dictée sont terriblement datées. L'élève Ducobu ne saurait être pertinent, voire impertinent car il n’est pas du tout dans l'air du temps. Son poupard franchouillard n'est pas que poissard et cabochard : il est surtout super ringard.