

Il ne reviendra pas sur RTL. Dans un long message, posté sur X (anciennement Twitter) dimanche 9 mars 2025, Jean-Michel Aphatie a annoncé son départ de la station du groupe M6. La direction de la radio l'avait mis à pied une semaine après ses propos sur la colonisation en Algérie. Le 25 février, le chroniqueur, qui participait à un débat comme il le faisait chaque semaine depuis la rentrée dernière, avait établi un parallèle entre la colonisation française en Algérie et le massacre de 642 habitants d'Oradour-sur-Glane en juin 1944 par le régime nazi. "Chaque année, en France, on commémore ce qui s’est passé à Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais on en a fait des centaines, nous, en Algérie. Est-ce qu’on en a conscience ?", avait-il déclaré dans "RTL matin", matinale présentée par Thomas Sotto et Amandine Bégot, au sujet de la conquête de l’Algérie par la France au XIXe siècle.
À la suite de ces propos qui ont beaucoup fait parler, la direction de RTL avait décidé de l'écarter de l'antenne durant une semaine. Dans son message publié dimanche, Jean-Michel Aphatie dit d'abord avoir "compris et admis la démarche des dirigeants de RTL". Mais sa "perception de la situation s'est modifiée" à partir du mercredi 5 mars, date du début de sa suspension qu'il qualifie de "punition". "Même décidée dans le cadre d’un dialogue serein et compréhensif, une punition reste une punition. Si je reviens sur l’antenne de RTL, je la valide, donc je reconnais avoir fait une faute. C’est un pas que je ne peux pas franchir".
Invités de "C à vous" ce lundi 10 mars, les présentateurs de la matinale Thomas Sotto et Amandine Bégot ont été interrogés à ce sujet par Patrick Cohen. "J'aime beaucoup Jean-Michel mais je lui en veux un petit peu", a commencé l'ancien visage de "Télématin". "Je lui en veux un petit peu parce qu'il fait deux choses. Il fait une chose qui est très utile en mettant la lumière sur un sujet qu'on connaît mal et qu'on n'apprend pas assez à l'école, au collège, au lycée, qui est la colonisation. Mais il cède à une plaie du moment qu'est le relativisme en mettant ça en relation avec Oradour-sur-Glane. Et il blesse des gens, il froisse des gens et ce n'est pas utile en fait". Pour Thomas Sotto, c'est la comparaison entre la violence de la conquête coloniale de l'Algérie par la France et le massacre d'Oradour-sur-Glane par les nazis qui pose problème. "Il dessert son propos, on n'est pas obligé de faire une comparaison des drames", estime le journaliste.
Celui qui a remplacé Yves Calvi à la tête de la matinale regrette néanmoins le départ de son chroniqueur. "C'est son choix, on le respecte, mais on peut aussi dire que c'est dommage parce que c'est une voix et un talent. Jean-Michel Aphatie, c'est une immense culture et moi j'aurais préféré qu'il reste", assure Thomas Sotto, qui affirme que la station "a tout proposé" au journaliste pour qu'il revienne. Thomas Sotto dénonce en revanche le procès fait à RTL sur la liberté d'expression. "Je n'accepte pas qu'on dise que c'est une atteinte à la liberté d'expression parce que ça n'est pas vrai. Sur RTL, chacun peut dire ce qu'il veut dans le respect de la loi et dans le respect des opinions de tout le monde", garantit l'anchorman avant de conclure : "J'aurais préféré qu'on puisse en parler calmement sans mettre cet excès, cette hystérie, sans courir après le buzz". "C'est pour ça qu'il y a des raccourcis et qu'on mélange tout", renchérit Amandine Bégot.
Quasiment à la même heure sur une chaîne concurrente, TMC, sur laquelle il intervient régulièrement dans l'émission "Quotidien", Jean-Michel Aphatie est revenu plus longuement sur ce qui l'avait amené à quitter RTL, une radio qu'il "aime". "J'ai beaucoup de respect professionnel pour les dirigeants mais si j'étais revenu, j'accréditais l'idée que la suspension correspondait à une faute or de mon point de vue je n'ai fait aucune faute". "J'ai lu beaucoup de choses sur l'Algérie française, et ce que j'ai lu m'a horrifié. (...) On a conquis la terre en massacrant des innocents pendant les 132 ans d'occupation", a développé le journaliste qui précise qu'il ne "mélange pas les choses" en qualifiant le régime algérien actuel de "dictature".
"Il y a aujourd'hui en Algérie des plaies ouvertes pour le mal que nous avons fait. Ce mal, les autorités françaises ne veulent jamais le reconnaître et la transmission de cette mémoire n'est pas faite en France. On oublie tout ça, on met un couvercle. Donc quand j'arrive avec mes gros sabots la première fois à RTL où j'en parle, je n'avais pas anticipé que le débat viendrait là-dessus, je comprends qu'il y ait de l'émotion", analyse avec le recul Jean-Michel Aphatie. "Mais l'émotion n'est pas liée à des erreurs que j'ai commises, elle est liée à une ignorance collective de ce qu'a été l'Algérie française. Regardons ce que nous avons fait et je crois que si honnêtement nous regardions ce que nous avions fait, des dirigeants de ce pays prendraient la parole pour dire que ces 132 ans d'occupation en Algérie ont été contraires aux droits de l'Homme et aux valeurs qui font la grandeur de ce pays. Si j'ai dit ça, si tout ça existait et si je ne vais pas à RTL, c'est parce que j'aime mon pays", a conclu le chroniqueur.