C'est un beau scoop qu'a décroché hier Le Figaro. Georges Malbrunot, journaliste du quotidien spécialiste du Moyen-Orient, a pu décrocher une interview exclusive du dictateur syrien, Bachar-el-Assad. Il est le premier journaliste occidental à y parvenir depuis juillet 2012.
Ce matin, le reporter français est revenu sur Europe 1 sur ce "gros coup" et a décrit à Thomas Sotto les coulisses de son entretien avec le Rais syrien. Il a ainsi indiqué avoir été reçu très simplement par Bachar-el-Assad pendant près de 45 minutes dans un faubourg de Damas, "sur une colline (...) non loin du palais présidentiel, dans la pinède". "On m'a retiré mon téléphone portable et mon enregistreur" a raconté Georges Malbrunot qui a affirmé ne pas avoir été fouillé avant d'accéder au lieu de l'entretien.
"Ça a été extrêmement libre !"
Quant à l'interview en elle-même, le journaliste du Figaro l'a décrite comme "très classique". "Ça a été extrêmement libre ! J'ai posé toutes les questions que je voulais, je l'ai interrompu quand je voulais, de ce point de vue là il n'y avait pas de restriction", a-t-il ajouté. Georges Malbrunot a expliqué que Bachar-el-Assad avait accepté cet entretien pour faire passer un message à la France, très en pointe concernant la risposte armée au massacre chimique perpétré le 21 août dernier. Le journaliste français a-t-il pour autant été utilisé par le président syrien ? "Oui, il (Bachar-el-Assad, NDLR) se sert des médias pour faire passer des messages, mais c'est le rôle de tous les hommes politiques" a rétorqué Georges Malbrunot.
Ce dernier n'est pas non plus dupe de la normalité affichée par le dictateur dans un pays où les rebelles sont aux portes de la capitale et où la communauté internationale menace de frapper militairement dans les jours prochains. Interrogé sur l'impresssion que lui avait faite le président syrien, le journaliste français a ainsi affirmé que son interlocuteur était "déterminé". "Il n'a pas montré de signe d'inquiétude apparent, mais je l'ai senti concerné, il a voulu montrer l'image de quelqu'un qui ne vivait pas terré dans un bunker avec un dispositif de sécurité particulièrement lourd". Georges Malbrunot a par ailleurs rapporté avoir posé une question sur le sort des deux journalistes français enlevés en Syrie en juin dernier, Didier François et Edouard Elias. "Il ne m'a pas donné de réponse, disant que s'ils ont été enlevés par des terroristes, il faut s'adresser à eux ; que s'ils sont rentrés illégalement en Syrie et arrêtés, ils seront jugés. Il n'en a pas dit plus" a indiqué celui qui a été plusieurs semaines otage en Irak en 2004.
"Un publi reportage" ?
Depuis la parution de cette interview hier sur le site internet du Figaro, les réactions dans la classe politique ont parfois été critiques envers le travail de Georges Malbrunot. Bruno le Roux, le patron des députés socialistes à l'Assemblée nationale a ainsi publié hier un message sur son compte Twitter remettant en cause l'opportunité d'un tel entretien. "Était-il utile d'offrir une tribune, presqu'un publi reportage à celui qui utilise les armes chimiques contre son peuple? J'en doute" a ainsi affirmé l'homme politique. Le Figaro avait tenté de devancer les attaques par le biais d'un éditorial d'Alexis Brézet, patron des rédactions du quotidien. Ce dernier a ainsi précisé aujourd'hui la démarche de son journal : "Donner la parole ne signifie pas approuver, ni cautionner. C'est apporter à nos lecteur, à l'opinion française et internationale, un élément essentiel à la compréhension du drame qui se noue" a-t-il écrit.